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Olivier Serva : Je défends la Guadeloupéanité pour nos enfants

Il est le monsieur économie de la Guadeloupe. Vice-Président de Région, il s’apprête à se lancer dans la bataille des législatives. De passage à Paris, il nous a accordé un entretien.

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97L : Qui est Oliver Serva ?

J’ai 43 ans. Je suis marié père de 2 enfants, un garçon de 13 ans et une fille de 11 ans. J’ai toujours habité aux Abymes. Je suis professeur agrégé d’économie et gestion, j’enseigne l’expertise comptable au niveau Bac +3, Bac +5 en DCG au lycée de Baimbridge et à l’université aussi. Je suis expert comptable et commissaire aux comptes avec mon cabinet de 11 salariés. Je suis aussi sensible à l’administration des collectivités par mon Master Administration et Gestion des collectivités et j’ai travaillé au cabinet du Maire de Baie Mahault à l’époque Mme Chamougon. Son directeur était Max Mathiasin et le 2ème adjoint était Ary Chalus. C’était en 1999 ça remonte ! J’ai aussi un mouvement politique Eko Zabym crée en 2010.

97L : Eko Zabym qui fait figure de modèle…

Effectivement. On a essayé de recréer le militantisme politique au point qu’on nous a sollicités pour créer d’autres Eko en Guadeloupe et même en Martinique mais nous gardons le cap de notre objectif principal à savoir apporter une alternative à la gestion communale Abymienne.

Nous sommes un mouvement relativement bien organisé avec plus de 800 adhérents à jour de leurs cotisations. Nous organisons une manifestation par mois que ce soit des marches, des conférences-débat, nous sortons un magazine : Eko Mag.

Eko c’est pour 3 choses, l’Economie, élément primordial dans nos sociétés où le chômage sevit, l’Ecologie, notre planète devant être protégée, 20% du territoire pointois sous les eaux dans les 30 ans si rien n’est fait, Echo pour porter notre voix. Je pense que c’est pour cela que nous sommes appréciés.

97L : Comment Ary Chalus a-t-il été porté à la tête de la Région ?

J’ai été le premier à dire qu’Ary Chalus devait être le nouveau Président. Au bout de 2 mandatures, il fallait changer sinon il y a de mauvaises habitudes de prises. Il  y a eu quatre forces qui ont porté Ary Chalus aux responsabilités : Ary Chalus lui-même avec son autorité naturelle, une présence sur le terrain indéniable et son excellent bilan à la mairie de Baie-Mahault,  le mouvement Eko Zabym, le GUSR Guadeloupe Unie, Socialisme et Réalités et une grande partie de la droite de la Côte Sous le Vent autour de Marie Luce Penchard.

97L : Vous êtes en charge du développement économique. Les avancées concrètes depuis 1 an ?

Je suis très content de certaines choses. Le taux de chômage en Guadeloupe a baissé de 2 % et de 3 % pour les jeunes en 2016. Mais ce n’est rien, ce n’est pas assez quand on connait les chiffres de non-emploi chez nous 30 % et 70 % pour les jeunes et ce n’est pas imputable qu’à la Région. La deuxième chose, c’est que je crois en l’entrepreneuriat : on ne peut pas embaucher dans les collectivités, les 3/4 étant sous tutelle. Les charges de personnel d’une vile comme Morne à l’Eau représentent 77 % des charges. C’est insupportable, cela veut dire que la mairie n’a aucune marge de manœuvre. Les Abymes, c’est 56 %. Les communes sont exsangues surement par des politiques électoralistes car les personnes embauchées doivent être ensuite titularisées et les 40 % de vie chère pèsent énormément sur le budget. On peut toujours soulager la douleur sociale, embaucher quelqu’un 3 mois, le renouveler, mais cela ne fait pas des hommes et des femmes émancipés.

Seul l’entrepreneuriat privé peut résoudre le problème du chômage. Pour nous à la commission développement économique, il s’agit d’attribuer rapidement aux différents porteurs de projet, aux chefs d’entreprise les subventions dont ils ont besoin. Aujourd’hui le délai est de 4 mois. Quand nous sommes arrivés au pouvoir c’était 18 mois. Il y a une commission par mois, avant une par trimestre et 2 fois par mois en commission permanente.

Ensuite, il n’est pas question de donner sans apport personnel, sans que l’on soit capable de mobiliser des énergies financières jusqu’à 20 % de la somme. 40 % de subventions peuvent être ainsi apportées. Et là où le bas blesse, ce sont les prêts bancaires. Aujourd’hui les banques ne jouent pas le jeu. Ce sont des organismes et on ne peut pas les obliger, mais force est de constater qu’aucune entreprise en création ne bénéficie de prêts.  Eh bien, on a crée un fond de garantie pour aider les entreprises, un prêt régional sans garantie, cela libérera les énergies et permettra d’aller rapidement. Il faut financer aussi le besoin en fond de roulement, le sur-stock qui vient souvent de l’hexagone du fait de notre insularité.

Notre principale avancée pour résumer c’est de faciliter la vie des créateurs d’entreprise afin qu’ils réalisent leurs projets et ainsi résoudre le problème du chômage.

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97l : Vous avez reçu  Emmanuel Macron en Guadeloupe et êtes l’un de ses soutiens. N’y a t-il pas incompatibilité par rapport à votre rassemblement régional de diverses forces politiques ?

Pourquoi y aurait-il incompatibilité ? Je ne crois pas qu’Emmanuel Macron soit contre le fait que la Guadeloupe soit prise en mains par des guadeloupéens. Au contraire, il y est favorable. Nous devons prendre toutes nos responsabilités dans le cadre de la république française selon l’article 73 de la constitution. Concernant l’équipe de Chalus, c’est une équipe hétérogène de guadeloupéens rassemblée pour l’élection régionale. Ces mouvements pour les élections nationales sont tout à fait libres de s’exprimer. Il se trouve qu’il y a une photo de la visite de Macron ici dans son programme. Dans un monde où le FN est fort et il ne fait pas bon s’afficher avec ce type de français, je trouve cela audacieux et cela me plait.

97L : Vous vous présentez dans la 1ère circonscription. Pourquoi ?

Tout d’abord, il fallait résoudre une difficulté. On n’aurait pas bien compris qu’à l’issue d’une belle élection en 2015, plusieurs partenaires s’affrontent comme cela aurait pu être le cas avec Mr Dominique Théophile. Cela été réglé. Maintenant je suis le seul candidat de la majorité régionale.

Trois raisons me poussent à me présenter : tout d’abord, si on n’y faisait pas attention, aucun membre de la majorité n’aurait eu une aura nationale. Ary Chalus ne sera plus député. Il faut ce lien entre le régional et le national. Sur certains dossiers, il est nécessaire de discuter au niveau gouvernemental et au niveau européen. Les décisions importantes se prennent dans ces sphères. Deuxième raison, le député actuel de la 1ère circonscription Jalton est le pus mauvais député de France. Ce n’est pas moi qui le dit, c’est le journal l’Express avec un absentéisme permanent. Il soutient un candidat : nous avons quelques doutes. Qui se ressemble, s’assemble. Nous avons besoin d’un député qui fasse honneur à cette fonction. Prenons l’exemple de la chlordécone. On s’est laissé empoisonner pendant 20 ans, alors qu’elle était interdite dans le reste du monde. Aucun député n’est monté au créneau à l’époque. Aujourd’hui le professeur Blanchet nous dit qu’au delà d’un taux, on est sur de développer un cancer. L’ARS dit : « Moi, je peux tester tous les guadeloupéens sur leurs  taux de chlordécone. Le ministère de la santé dit : « Non non ce n’est pas prévu par la loi ». Moi je propose un amendement qui permette à toute personne vivant en Guadeloupe et dépassant le seuil, de bénéficier du test du cyclotron.

Autre exemple : nous représentons 80 % de la biodiversité en Outre-mer. On peut développer une industrie pharmaceutique mais une loi scélérate dit : »On donnera l’agrément (aux laboratoires) sous conditions financières et techniques ». En clair, les petits laboratoires guadeloupéens seront écartés. Je voudrais un projet de loi qui dise que ce soit la région et pas l’Etat qui donne les agréments. Dernière proposition sur les vitres teintées, en Outre-mer il faut une dérogation pour des raisons évidentes de climat. Voilà des pistes de réflexion.

97L : La violence en Guadeloupe ?

C’est la principale préoccupation des Guadeloupéens. Il y a la prévention et la répression. Du côté prévention, on doit se demander pourquoi un jeune est tenté de braver les lois. Souvent c’est qu’il n’a pas d’autres perspectives. Il se dit : « No future ». Il faut pouvoir donner du travail aux jeunes notamment dans l’économie sociale et solidaire. Les associations créent le maximum d’emplois. Il est nécessaire d’accorder aux associations les mêmes facilités que celles données aux entreprises.

Ensuite on a tendance à mépriser les petits marchands : Vous savez ces vendeurs de bokits, de pistaches, de gâteaux, etc… Ça ne parait rien mais ça créée du lien social. Il y a une activité autour de cela. Je connais des familles entières qui ont pu en vivre. On veut aider ces petits lolos. Une petite entreprise peut devenir grande. Ensuite, pour la prévention, il faudrait aller sur le terrain pour la médiation, l’Etat reconnaissant lui-même avoir cédé dans ce domaine. Les policiers manquent aussi de moyens : il faut que les forces de l’ordre soient réhabilitées.

97L : Vous avez évoqué votre famille. Est-il facile d’élever des enfants actuellement en Guadeloupe ?

Ce qui est mis en avant par les médias ce sont les drames, les faits divers, les viols, les meurtres. Mais la Guadeloupe n’est pas que cela. La plupart des Guadeloupéens et surtout les jeunes respectent la loi, cherchent du travail. Les parents peuvent être moins audibles qu’avant face à des canaux d’éducation parallèle comme internet, le maillage familial s’est un peu disloqué, l’enfant est plus livré à lui-même qu’avant. Moi je défends la Guadeloupéanité. C’est consommer local, le goût d’un enfant se situant entre 0 et 3 ans afin de l’ancrer dans notre île. C’est développer l’autonomie alimentaire, c’est aussi lui transmettre des valeurs : le travail, l’envie d’entreprendre, le respect des autres, la tolérance. Nos enfants sont notre avenir, notre richesse. Nous voulons être fiers d’eux et eux demandent à fiers de nous.

Autres candidats annoncés de la 1ère circonscription : Rosan Rauzduel, Harry Durimel, Alix Huygues-Beaufond, Jessica Compper, Anouar Berguiga

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