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De la Chine à la Guadeloupe, la douloureuse Révolution culturelle

« Il est plus utile de tuer des moustiques que de faire l’amour », disait Mao-Tsé-Toung. Mais aussi : « La révolution est un drame passionnel ». Et encore « La révolution c’est un soulèvement, un acte violent par lequel une classe en renverse une autre ».

Notre corps aurait son propre médecin «intérieur», programmé dans notre ADN, et capable de toute capacité d’auto-guérison.

Est-ce pour cela que beaucoup ont voulu prendre d’assaut le CHU de Guadeloupe, et tout en bastonnant médecins et directeurs d’hôpitaux, y déployer une Révolution culturelle, devenir des « met a manyok a kilti gwadloup », gwo-ka, défilés de mode, expositions picturales et scéniques, un peu comme au Centre des Arts de Pointe-à-Pitre ? 

Dans un pays comme la Guadeloupe livré à l’anarchie, à l’absence de loi et à la rapacité des clans affairistes, politiques et syndicaux, «Rien de tel que d’étudier les révolutions pour se guérir des idées révolutionnaires et de toutes les utopies» ainsi que l’écrivait le sinologue Lucien Bianco.

Les thèses révolutionnaires sont d’une extrême simplicité, et malheureusement pour une part non dénuées de vérité. 

Dans une Guadeloupe et une Chine, réduites à l’état semi-colonial et semi-féodal, les peuples chinois et guadeloupéens croupissaient dans l’ignorance et la superstition, la misère et la crasse, la maladie et la famine, la drogue et la délinquance, la violence et le dérèglement des mœurs, tandis qu’une petite minorité de capitalistes compradores accaparait la richesse du pays et se prélassait dans le luxe et le vice.

Même si, selon le matérialisme historique, l’économie est, en dernière instance, le  facteur dominant dans l’histoire, le but de la « Révolution culturelle » est de mettre la culture sous le contrôle et au service du prolétariat.

La crise sanitaire a révélé, s’il en était besoin, que la culture qui comprend les arts et la littérature, l’enseignement, les sciences et les techniques, le sport, mais aussi le domaine sanitaire, est l’élément essentiel de toute superstructure, au sens marxiste. La superstructure désigne l’ensemble des idées d’une société, c’est-à-dire ses productions non matérielles. Les institutions, comme l’école, ou la manière de fonctionner d’un CHU, (pour illustrer notre propos), permettraient, selon les syndicats guadeloupéens, de traduire l’idéologie bourgeoise capitaliste. Les écoles, comme les hôpitaux, pour lutter contre cet état de fait, peuvent donc à juste titre, être saccagés et vandalisés.

Ainsi, la crise du CHU de Guadeloupe, s’inscrit dans le cadre d’un mouvement syndical lié à la contestation de l’obligation vaccinale déclenchée par un vieux révolutionnaire , Gaby Clavier- Mao, « contre » pourtant l’œuvre de sa vie, le CHU de la Guadeloupe, pour lui faire retrouver « sa pureté originelle ».

Les syndicats guadeloupéens voulaient prendre la tête d’un mouvement mondial visant à démontrer que le Covid constituait un plan secret visant à éradiquer 80 % de la population mondiale.

Selon eux, les gouvernements du monde entier avaient l’intention d’utiliser le prétexte du coronavirus pour imposer une vaccination massive à la population. L’ennui, c’est que loin d’immuniser contre le virus, ce vaccin serait composé de substances extrêmement dangereuses, fruits d’une manipulation génétique du Sars-CoV-2.

 

Après l’échec du « Grand Bond », Liu Shaoqi décide d’adopter un programme plus modéré et réaliste avec lequel il conduit le redressement du pays. Liu Shaoqi serait Gérard Cotellon.

Prenant conscience des conséquences de « la Grande Famine », il dit à Mao : Avec autant de morts de faim, l’Histoire retiendra nos deux noms, et le cannibalisme sera aussi dans les livres ».

Au début de 1962,  la «  Conférence des 7000 cadres » s’est tenue à Pékin, au cours de laquelle la politique de Mao a été critiquée. Après la Conférence, Mao a pris un rôle de semi-retraité et a laissé de nombreuses responsabilités à Liu Shaoqi et Deng Xiaoping.

Gaby Clavier-Mao pose un vrai problème mais de la façon la plus contradictoire et la plus aberrante possible. Le système de santé en Guadeloupe, comme le CHU, font peur à tout le monde. Après y avoir subi des soins, on y ressort presque en galopant, avide de contempler à nouveau les nuages de notre ciel antillais, et les palmiers qui bordent l’abrupt morne sur lequel se dresse l’établissement moribond, on se tâte, étonné d’être toujours en vie.

Pourtant, très souvent, et on ne cessera de tresser des louanges au personnel, ce CHU fait aussi des miracles.  

Mais tout comme Mao qui a choisi  comme cible principale le malheureux président de la République Liu Shaoqui, qui est certes un apparatchik un peu gris, mais l’exemple même de la frugalité, de l’austérité, du dévouement,  Gaby Clavier a choisi de pourfendre Gérard Cotellon.

Les deux hommes s’affrontent, d’abord dans un conflit masqué, puis ouvertement lors de la révolution culturelle.

En faisant marcher dans la rue les étudiants et les enfants des écoles embrigadés, – à l’instar des «  Ti Mas’ gwada » que Domota, Clavier, faisaient eux aussi défiler pour donner quelque consistance à leurs cortèges clairsemés-, Mao attise la rébellion par ses discours.

«  Nous devons abattre les sommités académiques réactionnaires de la bourgeoisie. Nous devons liquider tous les génies malfaisants. Nous devons purger la terre de toute la vermine ».

« Les masses sont les véritables héros ». 

Pendant trois ans, jusqu’en 1969, les gardes rouges avaient étendu leur influence. Ils distribuaient des prospectus, en affichant publiquement le nom de prétendus contre-révolutionnaires.

Les gardes rouges deviennent le bras actif de cette révolution culturelle. Ils remettent en cause toute hiérarchie. 

Dans cette chaotique et peu déchiffrable révolution culturelle, Mao en passe d’être écarté par ses camarades lance la jeunesse «  à l’assaut du quartier général », quitte à la faire réprimer par l’armée une fois le but atteint.

Mao est en colère de voir son prestige et son autorité diminués, et ses collègues – n’oublions jamais que les deux protagonistes Cotellon et Clavier ont été tous les deux, infirmiers-, prendre le contre-pied de sa politique. Son obsession de la dégénérescence de la révolution, et la nécessité de la revivifier, par la destruction des structures existantes si besoin est- ne va cesser d’augmenter. 

Les Gardes rouges se ruent sur les cibles qu’on leur désigne : les intellectuels- à commencer par les enseignants-, et les hauts fonctionnaires. Les victimes sont molestées, humiliées.

Des meurtres sont suivis de festins anthropophages. Les enfants-bourreaux battent et tuent les victimes qu’ils ont désignées, après les avoir dûment diabolisées.

Au plus fort de la Révolution culturelle, de macabres «  banquets », ont vu des convives dévorer les organes de leurs victimes contre-révolutionnaires : des scènes d’épouvante éradiquées de la mémoire officielle.

A Wuxuan, dans des campagnes isolées de la province du Guangxi, la barbarie a atteint des sommets : les cœurs, les foies et les parties génitales de victimes y ont été découpés et cuits avant d’être consommés par leurs tortionnaires.

En 1955 le maoïsme n’avait pas encore produit les monstruosités qui allaient le discréditer.

La tribune publiée par Roland Barthes dans le journal Le Monde après la visite qu’il avait effectuée en Chine avec ses amis de la revue Tel Quel en 1964, est sidérante. Un article dans lequel il vantait la beauté de la calligraphie des dazibao affichés sur les murs de Pékin. 

Il s’agissait pour ceux qui savaient lire les caractères, répliqua et avait fait alors remarquer Simon Leys avec une ironie glacée, de la liste des condamnés à mort qui devaient être exécutés le lendemain.

La Révolution culturelle c’est la fin sanglante et pathétique d’un coup d’état manqué, de vieux leaders syndicaux incapables de construire le grand état moderne qu’ils avaient promis au peuple, craignant d’être évincés par l’élite compétente du pays.

Revenons sur le destin du malheureux Liu Shaoqi  accusé de suivre la voie capitaliste. En octobre 1966, il doit faire son autocritique. En 1967, il est expulsé du parti. Enfin il est chassé de la présidence de la République en octobre 1968. Il meurt en prison en 1969.

Heureusement que nous sommes en 2022 et que les hauts fonctionnaires de l’état français  ne subissent pas le même sort. Gérard Cotellon devrait adopter un nouveau slogan : « Je suis un révolutionnaire cubain mais déchouké en Guadeloupe ».

Cuba est l’un des premiers pays à avoir vacciné les jeunes enfants. Depuis le 3 septembre 2021, l’île vaccine les enfants dès l’âge de 2 ans.

Cotellon disait aussi qu’il ne connait pas de pays, où on puisse faire fonctionner un hôpital sans médecins. Une question se pose. De faux médecins exerceront-ils en Guadeloupe ? Samantha, en Saône-et-Loire, bardée d’un faux diplôme, avait fait croire qu’elle était médecin généraliste.

Cette histoire, loin d’être anecdotique, pourrait avoir causé des dégâts humains, soulignait Capital du 29/11/2020. Deux de ses anciens patients sont décédés.

«  Elle est soignée depuis 2012, elle est schizophrène, elle entend des voix qui lui disent que, dans la vie, il faut aider les autres, il faut les soigner », avait fait savoir auprès de TF1, son avocat, dans le Saône -et-Loire.

Comme soigner les patients guadeloupéens sans CHU, et sans médecins ?

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Théo LESCRUTATEUR

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