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Les forêts de Guadeloupe peuvent-elles disparaître ?

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La scientifique Barthélémy Dessanges dans une publication de mars 2022 dressait les constats suivants sur les forêts guadeloupéennes.

Particulièrement liées à l’humidité à laquelle elles sont dépendantes, ce sont des sujets de choix pour observer l’influence du réchauffement planétaire. Ces formations végétales sont mal connues, et leur étude dans le cadre du changement climatique ne fait pas exception. Riches en espèces endémiques et regroupant une forte biodiversité, on trouve ces forêts au-delà de 550 m en Basse-Terre, sur le territoire guadeloupéen, en cœur de Parc national. Cette zone présentant toutes les caractéristiques nécessaires à une évaluation, deux scientifiques Maguy Dulormne (Université des Antilles) et Éléonore Mira (Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’alimentation et Environnement) se sont attelées à savoir de quelles données elles avaient besoin, en concordance avec l’Unité Mixte de Recherche ÉCOlogie des Forêts de Guyane (UMR ECOFOG).

Contrairement à la majeure partie des études dans le domaine, ce n’est pas en étudiant l’ouverture et la fermeture des « pores » de la surface des feuilles (appelées les « stomates »*1), témoins de la transpiration de la plante, que ces scientifiques vont récolter la majeure partie de leurs données.

Dans le cas de cette étude, ce sont les caractéristiques des échanges gazeux entre les plantes et l’air environnant qui sont les principales sources d’information. En effet, les mouvements des stomates des feuilles jouent un rôle d’indicateurs, mais secondaire, dans l’étude. C’est l’intensité et les conditions d’échanges de ces flux par rapport aux variations climatiques qui vont être au cœur des relevés dans la seconde partie de cette étude.

En premier lieu, un état des connaissances a été réalisé. Les forêts insulaires ou côtières présentent un étagement de la végétation plus dense qu’en zone continentale, car les conditions climatiques changent plus rapidement et influent directement sur les espèces présentes à chaque altitude. Cela explique notamment le fait que l’on retrouve autant d’étages de végétation différentes dans les forêts de la Basse-Terre (d’une altitude maximale d’environ 1000 m) que d’étages de végétation dans les massifs arborés continentaux (d’une altitude maximale de 3500 m). De plus, la richesse en espèces endémiques des milieux forestiers altimontains est très conséquente, plus importante que celle des étages de forêts situés à des altitudes plus basses.

Avec 28 espèces exclusives au milieu forestier tropical montagnard, le taux d’endémisme est de 1/3 d’espèces se trouvant uniquement dans les forêts de nuages. Regroupant plus de 108 espèces communes avec la forêt dense de basse altitude, et 14 espèces présentes dans la majeure partie des types de forêts, la nécessité de comprendre cet environnement devient crucial.

Pour ce qui est du lien avec le climat, les estimations pour les 50 à 80 ans à venir sont une augmentation globale de la température terrestre de 1 à 4 °C, et océanique de 1°C en surface. Couplées à une diminution des régimes de précipitations (fréquence et intensité) de 10 à 20 % sur l’année, avec des creux descendants à moitié moins de pluies certains mois, l’environnement global en sera sans aucun doute altéré.

Ces changements ne sont pas lointains : on en constate déjà dans certaines régions ou à notre échelle locale. Dans le cas où ces projections s’avéreraient correctes, cela changera le régime d’intempéries de « tropical humide » à « tropical sec » pour les îles des Petites Antilles. Comme la distribution de l’eau sur un territoire détermine les espèces que l’on y trouve et leur abondance, de nombreuses zones verront leur peuplement drastiquement changer. Cela est d’autant plus vrai avec les forêts de nuages, car elles sont particulièrement exigeantes en matière d’eau.

La forêt, c’est encore un peu du Paradis perdu. Dieu n’a pas voulu que le premier jardin fût effacé par le premier péché, écrivait Marcel AYME.

La forêt guadeloupéenne est-elle en capacité de survie ?
Barthélémy Dessanges nous dit tout dans la deuxième partie de l’étude que nous reproduirons prochainement.

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Théo LESCRUTATEUR

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