(Certains) avocats antillais peuvent trembler
En évoquant l’affaire Patrice Tacita, pour notre reprise après des vacances studieuses, consacrées à l’impitoyable passage en revue de nos failles, de la fuite de nos jeunes, de notre affaiblissement intellectuel, des ravages de la drogue, du scandale de l’eau, et comme l’actualité nous le prouve chaque semaine, de la paresse, du manque de clairvoyance et du délitement de nos « élites », de la dégradation constante du niveau scientifique, – les inepties et contre-vérités répandues lors de la crise Covid en ont été la preuve tragique, inepties renforcées par une gestion calamiteuse de la pandémie-, du goût prononcé pour le dénigrement, la déqualification et l’avilissement des autres, nous essayons seulement de comprendre comment un groupe a accaparé l’espace médiatique pour protéger l’un des siens.
Pourquoi une justice indépendante devrait-elle avoir plus de mansuétude à l’égard de Patrice Tacita, que pour Louis Molinié ou José Gaddarkhan, condamnés pour fraude fiscale ?
Nous avons des idéologues-militants nombreux, qui produisent non pas la réflexion et le sens critique qui permettraient de saisir les mondes guadeloupéen et martiniquais, mais qui usent d’une violence verbale dogmatique, et relaient les discours des syndicats nationalistes au point qu’ils frôlent la mythomanie, avec une tendance pathologique à tout instrumentaliser.
On a vu nos avocats, serrés en rangs d’oignons, s’estimant sacrés comme l’étaient les oints du Seigneur, lors de la première audience de l’affaire Tacita.
On a encore vu vendredi dernier, les avocats de Patrice Tacita pourfendre la justice coloniale, avec des arguments encore une fois « hors sol », et qui doivent faire se tordre de rire la magistrature française, tant les données sont simples : l’avocat du LKP sera-t-il reconnu coupable ou non de fraude fiscale ?
En mai dernier, l’avocat réputé du barreau de Paris, Philippe Dehapiot, connu pour avoir défendu Thierry Herzog, Bernard Tapie ou Yvan Colonna a été condamné en appel pour fraude fiscale à une peine de 3 ans d’emprisonnement dont 6 mois ferme aménagés à domicile sous bracelet électronique.
Considéré comme l’un des meilleurs spécialistes de la procédure pénale, il devra également verser une amende de 50 000 euros et effectuer un stage de citoyenneté.
En première instance, Philippe Dehapiot avait été condamné en avril 2021 par le tribunal judiciaire de Paris à 3 ans de prison dont 10 mois avec sursis, à une amende de 200 000 euros et à une interdiction d’exercer son métier pendant 3 ans pour une « défaillance complète au titre de ses obligations déclaratives et comptables » entre 2014 et 2018.
La condamnation de Philippe Dehapiot relève-t-elle d’une sombre manœuvre de la justice coloniale française ?
« Tous les impôts que je devais ont été entièrement réglés, donc la condamnation est d’une sévérité extrême, c’est la raison pour laquelle je fais appel », avait-il dit alors. Ses avocats avaient plaidé la « phobie administrative ».
Chacun pourra se faire une idée plus précise des possibles sanctions encourues par l’avocat Tacita, au vu des conclusions des tribunaux parisiens rendues à l’encontre de Philippe Dehapiot,
Il s’agit pour nous de briser l’omerta soigneusement entretenue par les barreaux guadeloupéens et martiniquais, qui témoigne de la perte du sens de leur responsabilité.
Notre fonction « d’intellectuel » en tant que producteur d’idées, est notre autonomie vis-à-vis de tous les pouvoirs.
Le secrétaire général de l’OCDE, M. Angel Gurria, avait prédit, le 6 avril 2009, dans un entretien au journal Le Monde, que « celui qui veut frauder n’aura bientôt nulle part pour se cacher ».
L’impôt n’est pas une sanction, mais le prix à payer pour une société civilisée (Henry Morgenthau Jr « Note du Trésor sur la fraude et l’évasion fiscale, 21 mai 1937 », publié in L’Economie politique, n° 19, 2003, p. 63).
No Comment