Société

Les enfants de l’Apocalypse

Le Titan devrait s’appeler anti-Titan. Tous ceux qui rêvent de prendre d’assaut le ciel découvrent leur enfer, nous lançait le célèbre écrivain Thomas Mann.

Dans un article du 17 mars 2018, la journaliste Louise-Maude Rioux Soucy du journal LE DEVOIR faisait part de son effarement, suite au documentaire de David Korn-Brzoza.

Ils seront des milliers d’enfants à grandir dans l’exaltation du nazisme, qui en fera ses porte-étendard avant de les plonger dans ses ténèbres. C’est la transformation de ces enfants en soldats par le troisième Reich que le réalisateur détaillait.

Une dizaine d’anciens membres des Jeunesses hitlériennes y racontent leur enfance.

La journaliste insiste sur l’engrenage mis en place alors que sont évincés parents, famille, école et église au seul profit du parti nazi. L’attrait de ses camps d’été où l’on multiplie les grandeurs nature en uniforme devient vite irrésistible.

Deux millions de petits Allemands s’y engagent avec une ferveur exemplaire.

« On jouait à la guerre, c’était l’aventure ! » Pour la majorité, l’état de grâce durera longtemps. Pour d’autres, chétifs ou jugés impurs, l’humiliation ne fait que commencer.

Le régime tablera longtemps sur l’image de ces jeunes biberonnés de haine que la propagande s’arrache. Mais cette ferveur-là ne les mettra pas à l’abri. Quand la guerre s’embourbera, les plus jeunes seront dépêchés sur le front intérieur, tandis que les autres passeront aux premières lignes.

Pour ceux qui ont survécu, le traumatisme est encore vif et leur parole, essentielle : « On nous aura convaincus qu’il y avait des sous-hommes. C’est terrible, ce poids qu’on nous a fait porter ».

Geneviève Welsh dans Enfances et Psy 2017/2 nous interpelle avec ce constat. Aujourd’hui, des enfants sont tués, blessés ou laissés orphelins au cours d’actes de guerre, de génocide ou de terrorisme. Depuis 2010, le nombre d’attentats a augmenté de 600 % dans le monde, le nombre de tués a été multiplié par 9.

Aujourd’hui comme hier, des enfants sont utilisés pour être des bourreaux. En Ouganda, en Sierra Leone, au Sri Lanka, au Mozambique, dans les conflits du Moyen-Orient, les enfants sont embrigadés, combattent, exécutent. Entre 1975 et 1979, les Khmers rouges avaient enrôlé des adolescents comme soldats, et utilisaient des enfants comme mouchards susceptibles de dénoncer leurs propres parents et, par là même, de les faire exécuter.

Aujourd’hui, des enfants ou des adolescents entrent dans leurs écoles pour massacrer. Les « school shootings », fusillades scolaires, s’internationalisent après avoir concerné principalement les USA : ces tueries deviennent peut-être un phénomène qui attire une frange de la jeunesse mondiale et non plus seulement les jeunes américains.

Nous pensons à ce syndicaliste guadeloupéen qui s’est attribué la qualité de « Guadeloupéen vertical », et qui sous-entendait forcément qu’il y avait des guadeloupéens inférieurs.

Nous pensons à ces petits de 7 ou 8 ans embrigadés à Pointe-à-Pitre par les ténors syndicalistes pendant la crise covid, pour alimenter les défilés anti-covid du samedi.

Ces dizaines d’enfants, ont pu en toute bonne foi, s’écrier : « On joue à la guerre, c’est l’aventure » ! D’ailleurs les hordes de jeunes qui ont saccagé les commerces de la région pointoise étaient âgés à peine de 12 à 13 ans.

Dans Les Justes, Albert Camus fait dire au nihiliste révolutionnaire Stepan. « Quand nous nous déciderons à oublier les enfants, ce jour-là nous serons les maîtres du monde et la révolution triomphera ».

L’apocalypse ne peut être relative, confirmait Thomas Mann. Elle n’est qu’absolue.

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Théo LESCRUTATEUR

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