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Jeremie Petit : le plus africain des antillais

L’Afrique, loin des clichés misérabilistes, avec son milliard d’habitants représente un marché gigantesque. Une nouvelle classe moyenne émerge. Dans cet environnement de plus en plus favorable à l’entrepreneuriat, Jeremie Petit un guadeloupéen  a décidé d’y investir et a crée une structure internationale.  Rencontre avec un ultramarin pour qui l’Afrique est son eldorado.

97L : Pouvez-vous vous présenter ?

J’ai 35 ans. Je suis d’origine guadeloupéenne mais je suis né à Paris. J’ai grandi dans le 95 et je vis à Dakar au Sénégal depuis bientôt près de 10 ans où j’exerce la profession de chef d’entreprise. Je suis fondateur de deux entités : Oxygen Africa, société de production audiovisuelle : le shooting photo, le clip vidéo, la série télé, le long métrage en passant par le film publicitaire, l’autre entité African Victory société spécialisée dans la production de projets musicaux et le développement d’artistes.

97L : Votre installation en Afrique est-ce un hasard ou une volonté délibérée ?

Je dirai que c’est un peu entre les deux. J’ai un parcours d’entrepreneur un peu atypique : autodidacte, j’ai commencé dans le milieu de l’audiovisuel à Paris où j’amenais un nombre considérable de projets dans l’industrie musicale pour les majors compagnies comme Universal, Warner Music, etc… J’ai fait beaucoup de clips pour des artistes de rap et R&B, comme Rohff, Booba, La Fouine…

Je pense que ce qui détermine les variations de chemin, si je puis m’exprimer ainsi, ce sont les rencontres : il y a d’abord celui qui m’a coopté sur cette structure parisienne, qui m’a permis de rentrer dans le monde de l’audiovisuel à savoir OCM Olivier Cerejo Meneses, puis la rencontre de deux hommes d’affaires africains Edgar Yonkeu, un producteur et Fabrice Sawegnon, Directeur Général du plus grand groupe de communication d’Afrique de l’Ouest qui m’a donné l’opportunité de faire tous les films publicitaires pour un opérateur historique Alizé qui devenait Orange. Ce projet a été déterminant pour mon installation en Afrique car il a eu une telle visibilité, un tel rayonnement qu’il m’a permis de  développer pas mal de projets.

 Nous ultramarins avons la capacité d’évoluer dans des milieux de créatifs ou d’entrepreneurs 

97L : On dit souvent que nous sommes une communauté de fonctionnaires. Votre opinion ?

Très bonne question et je vais citer en exemple mes parents. Depuis tout jeune, ils auraient été plus rassurés de me voir prendre une orientation professionnelle plus conventionnelle. A l’époque, ils n’étaient pas du tout favorables à mes choix de carrière dans le milieu musical. Ce sont des gens  qui ont des convictions religieuses et ils m’ont inculqué certaines valeurs. Cela n’a pas été simple. Ils n’avaient pas une vision limpide de la différence entre le milieu artistique et le milieu audiovisuel. Et sans vouloir stéréotyper les familles antillaises, j’ai  l’impression qu’on est plus rassuré quand les enfants prennent une direction classique. J’ai un grand respect pour les fonctionnaires, évidement, je pense juste que nous ultramarins avons la capacité d’évoluer dans des milieux de créatifs ou d’entrepreneurs selon nos envies.

97L : Vous êtes à la croisée des chemins entre l’Afrique, l’Europe et les Amériques. Les musiques porteuses sont-elles caribéennes ou africaines ?

Je pense au mélange des deux. Quand on regarde aux USA,  la tendance est plus une touche de dancehall qui est venue s’ajouter dans les musiques urbaines,  du type trap ou rap ou hip hop. En exemple : le succès que Drake a eu avec One Dance. On voit au niveau des musiques urbaines francophones de plus en plus d’ingrédients  traditionnels africains venir se mixer au hip hop français ce qui a donné l’afro-trap et explique le succès d’artistes comme MHD.

97L : L’Afrique est-ce le continent de l’avenir ?

Complètement. Pour ma part, ça fait bientôt 10 ans que j’y suis. On est arrivé  à un moment où le paysage audiovisuel avait besoin de réactualiser ses codes en terme en créativité. C’était en 2004 et j’ai découvert un pays, le Sénégal avec une culture de l’hospitalité extraordinaire et des possibilités de développement. Un autre pays en plein boom économique : la Cote d’Ivoire mais je pourrais vous en citer d’autres : le Mali, le Cameroun… Et en tant qu’entrepreneur, je dois dire que j’ai pu au fil des années me rendre compte que ce sentiment que j’ai eu des mes premiers pas sur ce continent était complètement fondé. Pas mal de structures françaises, des PME plus humbles y investissent, leurs fonds. C’est le continent de l’avenir, c’est là où tout se passe, avec une croissance à deux chiffres.

 

Mes échecs d’hier sont mes réussites d’aujourd’hui

97L : Est-il encore possible d’être un autodidacte dans votre profession ?

Je vais profiter pour passer un message à toute cette jeunesse afro caribéenne et réunionnaise. Pour moi, l’important c’est la dynamique positive : l’envie de faire quelque chose. Je ne savais pas  précisément ce que j’allais faire mais je savais que j’allais  entreprendre. Après il faut se lever et y aller. Il y a des étapes préalables : choisir son orientation, aller vers quelque chose qui vous plaise. La passion est un élément très important : elle vous amène à faire des choses au delà de vos capacités initiales.

Les études sont un élément important, c’est une base. Je n’ai pas fait de grande école et papa de deux enfants, je vais tout mettre  en oeuvre pour qu’ils aient le meilleur back ground scolaire possible. Mais je considère  que l’expérience professionnelle sur le terrain est primordiale. Le nombre de fois où je suis tombé, j’ai chuté et j’ai tout fait pour me relever, pour continuer à avancer est ce qui a construit ma force d’aujourd’hui. Je dis à mes collaborateurs : Mes échecs d’hier sont mes réussites d’aujourd’hui. Dans les situations négatives, il faut savoir en tirer le positif. Et c’est ce qui m’a aidé à me réaliser en tant que chef d’entreprise.

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Joël DIN

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