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Assassinat de Jovenel Moïse : l’ombre de Washington

Des extraits d’un article du 14 octobre de Pablo Jofre Leal pour TeleSUR chaîne de télévision vénézuelienne à vocation pan-latino-américaine : « Assassinat du Président d’Haïti : Washington dans l’ombre ».

Dans la mer des Caraïbes se trouve l’île d’Haïti, considérée comme pays le plus pauvre du continent américain… Un pays à la une de l’actualité internationale, que ce soit en raison de problèmes d’instabilité sociale, de migration, de catastrophes naturelles, ainsi que de drames politiques, comme l’assassinat, en juillet 2021, du président en exercice Jovenel Moïse.

Haïti a été le premier pays d’Amérique latine à accéder à l’indépendance, au début du XIXe siècle (1804) grâce à un processus révolutionnaire unique, combinant l’abolition de l’esclavage pour la population noire et l’indépendance politique par rapport à la France…

Cette terre de montagnes connaît actuellement une déforestation de près de 95 %, les tempêtes tropicales engendrant de graves inondations et d’importants phénomènes d’érosion. Malgré cela, Haïti continue d’être un territoire d’une grande importance géostratégique, en raison de sa proximité avec les États-Unis et Cuba, voisin maritime immédiat d’Haïti et intermédiaire maritime et aérien vers la République bolivarienne du Venezuela, ces deux pays soumis à une pression politique maximale de Washington.

Les États-Unis sont aussi présents par l’intermédiaire d’organisations non gouvernementales et de fondations comme celle de l’ancien président Bill Clinton ayant une forte influence sur la vie économique et politique en Haïti, générant des distorsions politiques, économiques et sociales.

On constate une augmentation marquée de la corruption, catalyseur d’une crise politique et socio-économique dans la fragile république antillaise où le manque d’institutions étatiques laissent la population insatisfaite. Tout cela couplé à l’aggravation de la lutte entre les principaux groupes criminels, ainsi qu’à l’augmentation de l’émigration, du commerce des armes et du trafic de drogue… L’assassinat du Président Moïse est à la jonction de tous ces phénomènes.

Jovenel Moïse a été exécuté le 7 juillet 2021, à son domicile, où son épouse Martine a également été blessée. Un crime commis par une vingtaine de mercenaires – des colombiens embauchés par la société Counter Terrorist Unit Federal Academy (CTU) basée à Miami et dirigée par le Vénézuélien, proche du président colombien Iván Duque, Antonio Emmanuel Intriago et de deux Haïtiens de nationalité américaine.

Des mercenaires ayant reçu une formation militaire aux États-Unis, comme l’a confirmé le Pentagone lui-même, dans le cadre de programmes de coopération sécuritaire avec l’armée colombienne. Certains de ces détenus avaient même travaillé pour la DEA, l’agence américaine de lutte contre les stupéfiants et le FBI, ce qui rend improbable que ce projet d’assassinat soit resté méconnu dans les plus hautes sphères politiques américaines.

Le cerveau de l’assassinat serait un médecin américain d’origine haïtienne, Christian Emmanuel Sanon, basé en Floride – une terre fertile pour mercenaires et autres exilés d’extrême droite d’où des attaques permanentes contre les pays d’Amérique latine ont été lancées – qui aurait contacté le chef de la Sécurité du palais présidentiel dans la capitale haïtienne, Dimitri Herard, auteur de nombreux déplacements à Bogota, Panama et Miami dans les semaines précédant l’assassinat de Jovenel Moïse.

Selon des informations fournies par l’agence AP, il s’est avéré que Sanon avait été approché, en Floride, par des personnes prétendant représenter les départements d’État et de justice des USA dans le but d’en faire le président d’Haïti…

Pendant ce temps Martine Moïse, l’ex-première dame d’Haïti a accusé l’oligarchie du pays d’être derrière l’assassinat de son mari. Une oligarchie étroitement liée aux États-Unis et à la France, opposés aux tentatives de changement de Moïse désigné comme un usurpateur, puisqu’il n’avait pas cessé ses fonctions le 7 février 2021 comme il se le devait.

Les médias Nord-américains évitent les déclarations publiques sur les diverses hypothèses sur l’origine du meurtre de J. Moïse… Pas de d’échanges significatifs sur cette question et le constat de l’intérêt des élites politiques haïtiennes fidèles à Washington, à cacher les causes véritables et les possibles auteurs à savoir ceux qui ont conçu, financé et réalisé cet assassinat.

Rappelons qu’immédiatement après la fusilllade, le gouvernement de Joe Biden a envoyé ses représentants politiques et militaires, dont un groupe spécial du FBI, afin de fournir « une assistance-conseil » aux autorités haïtiennes nouvellement nommées, actuellement présidées par le Premier ministre sortant, Ariel Henry, afin d’amener les forces politiques contrôlées par Washington à la direction du pays.

Haïti a connu une brève période d’incertitude politique entre le Premier ministre Henry (nommé le 5 juillet 2021, 2 jours avant l’assassinat de Moïse) et le Premier ministre par intérim, Claude Joseph, lui même réclamant l’intervention des troupes américaines, comme l’a déclaré la porte-parole de la Maison Blanche, Jenn Psaki – mais la pression internationale a fait pencher la balance pour Henry, le confirmant dans sa position le 20 juillet…

Henry a licencié le 29 septembre les 9 membres du Conseil électoral provisoire (CEP) après les avoir accusés d’être « partisans ». Une décision qui reporte les élections prévues le 7 novembre, qui coïncideraient avec un appel au référendum pour modifier l’actuelle Constitution.

Une décision qui viole le soi-disant « Accord de gouvernance pacifique et efficace » signé entre Henry et plus d’une centaine d’organisations politiques haïtiennes, quelques semaines avant la destitution des membres du CEP et qui prévoyait des élections pour le milieu de l’année 2022.

Ariel Henry après des études de médecine en France et aux États-Unis, est lié à l’Église des Saints des Derniers Jours (Mormons), soupçonné de complicité dans le meurtre de Jovenel Moïse, a décidé d’avancer les élections présidentielles et de modifier la Constitution, comme le voulait Moïse précédemment.

Il a été accusé de chercher à garantir l’impunité aux membres de son gouvernement accusés de corruption et de soutenir les multinationales impliquées exploitant l’or et l’argent dans ce pays de 27 750 km carrés, fournissant un cadre constitutionnel qui donnerait à la présidence la prérogative sur l’avenir des concessions minières.

La question est de savoir si la nouvelle Constitution contiendra ou non ces éléments favorables aux multinationales étrangères.

L’ensemble des faits, l’histoire des coups d’État dans toute l’Amérique latine dont les États-Unis ont été le principal acteur, indique que Washington a travaillé à un scénario favorable à ses intérêts en Haïti.

L’amorce a été une forte remise en cause de Jovenel Moïse – qui ne servait plus les intérêts de Washington, devenu hors de contrôle et trop exposé dans ses liens avec la corruption… – et qui perdure aujourd’hui par la mise en place d’élections favorables aux groupes pro-américains.

Une campagne de limogeage de fonctionnaires constituant un frein aux intentions de l’actuel Premier ministre, la désorganisation du système gouvernemental, le renforcement du pouvoir des forces pro-américaines.

Washington, par le travail d’infiltration développé à l’OEA et son Secrétaire général, l’Uruguayen Luis Almagro, s’est consacré à étudier la réaction des puissances critiques à l’ingérence américaine en Haïti, ainsi que des organisations internationales, afin d’ajuster leur plan d’hégémonie sur Haïti, sans générer de critiques régionales ou mondiales dans l’intention de monter un plan de domination, servant à mettre en œuvre ses « révolutions de couleur » dans des pays d’Amérique latine : Cuba, le Nicaragua et le Venezuela ou d’autres qui sortent du chemin prédéterminé par le géant du Nord.

Haïti semble avoir été le terrain d’expérimentation qui a permis l’assassinat d’un dirigeant de notre continent. Et là, comme toujours, tapie dans l’ombre, se trouve la main de Washington.

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