Société

« Ce qu’on reproche à Sibeth Ndiaye, c’est d’être une femme noire qui a réussi » 

Il aura fallu un article pour réveiller, au cœur de la langueur estivale, des passions enfouies qui pourrissent la vie de notre pays et dont nous ne pouvons plus être les spectateurs muets…

Que s’est-il donc passé pour que le portrait de Sibeth Ndiaye, en fin de journal, supplante les premières pages ?… Pourquoi donc un SMS supposé deviendrait une infamie à nulle autre pareille fleurant bon le scandale ? Dans un milieu où la brutalité, langagière ou non, est monnaie courante, ce message prêté à la conseillère du président doit-il être décortiqué sous toutes les coutures.

Disons les choses clairement : ce qu’on reproche à Sibeth Ndiaye est d’être noire et femme ; ce qu’on lui reproche, aussi, c’est d’avoir réussi.

Toutes les composantes frayant à la frontière entre droite et extrême-droite ont ici trouvé un sujet d’indignation à prix discount, une troisième démarque avant la fin des soldes, une session de rattrapage après une année noire. Après avoir tant combattu Simone Veil, elles peuvent exhiber une preuve que d’autres composantes de la société française ne l’estiment pas.

Leur sérénade est connue, elle consiste à illustrer les dangers de l’immigration sous toutes ses formes. Et le cas Ndiaye est commode ; il est employé pour attester que même à l’Elysée, « ces gens-là » sont mal élevés…

Ce qui est plus préoccupant cette fois, c’est que la prétendue affaire Ndiaye a dépassé le cadre nauséabond de la fachosphère et de ses franges pour s’inviter dans le commentaire politique et dans la discussion des thèmes d’actualité, réflexe inconscient d’une élite qui ne voit pas que derrière ses ricanements s’exprime un refus de voir des profils atypiques réussir à leur tour. La diversité, la différence, on l’aime bien lorsqu’on doit l’aider, on l’aime bien dans le sport ou la musique, plus vraiment lorsqu’elle est au cœur de la machine du pouvoir…

Le cas de Sibeth Ndiaye est tout sauf anecdotique. Il ressemble au quotidien de milliers de nos concitoyens issus de l’immigration qui accèdent à des responsabilités dans leur univers professionnel et qui, malgré leurs efforts et la réalité de leurs compétences, sont perçus comme des passagers clandestins. Ils en viennent à se demander eux-mêmes si leurs accomplissements professionnels n’ont pas été commis par effraction.

Ces situations abîment le sentiment d’appartenance à notre pays, car le cœur de sa promesse est justement de reconnaître les mérites de chacun… Ces situations alimentent la panne de notre modèle d’intégration et le sentiment d’une forme d’hypocrisie de nos institutions…

Dans un tel contexte, que valent la promesse républicaine et les discours pleins de bons sentiments sur la réparation de l’ascenseur social ? Devrons-nous tolérer dans notre vie nationale que tous les Français de fraîche date accédant à des responsabilités soient dépeints comme des caractériels, des brutaux, des incapables, de joyeux drilles promus par l’opération du Saint-Esprit ?

Sibeth Ndiaye ne demande pas de statut particulier. Elle fait son métier. Assez discrètement d’ailleurs, ce qui, à l’ère du tweet, est rare pour un conseiller en communication. Elle le fait avec son style et avec des compétences qui lui ont permis de contribuer à une victoire à l’élection présidentielle. C’est tout ce qui devrait compter.

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