Pourquoi n’avons-nous pas de leaders aux Antilles, Coronavirus ou non ?
Qui est le MASTER BRAIN de la Guadeloupe, en matière épidémiologique ? Ne parlons même pas du domaine environnemental. Assurément pas ceux qui sont à la Région Guadeloupe !
« Le docteur, c’est la mer et l’autre docteur, le rhum. Corona ou non Corona. Prenez un bon p’ti bain. Ah Ah Ah Ah » !
Il se fait filmer sur une plage derrière les rochers. « Je suis dans ma piscine naturelle » ! Il déguste le verre de punch qu’il montre avec un plaisir non dissimulé. Il en rajoute et fait le show. « Période de confinement. Ou ni dwa sôti pwan on ti bain ! Le docteur : la mer… Et le rhum » !
Il nous fait peur ! Il est vice-président de la Commission culture région Guadeloupe, membre de la Commission développement économique, octroi de mer, innovation et recherche. Et nous sommes en période de coronavirus. Rappelons que ce virus a déjà tué plus de 170 000 personnes dans le monde.
Peut-être après tout, deviendra-t-il un héros si les scientifiques nous apprennent dans quelques mois, que le fait de se baigner sur une plage de Guadeloupe en buvant du rhum est une barrière et un antidote au coronavirus ? Mais j’en doute.
Analysons ce qui se passe en Espagne, car avec ces hommes politiques qui nous disent qu’ils sont plus antillais que n’importe lequel d’entre nous, nous finissons par nous poser des questions.
En Espagne, les règles de distance entre personnes pour éviter la propagation du coronavirus devront rester en vigueur cet été, même à la plage.
« Il est très important que les recommandations sanitaires soient maintenues, nous allons devoir intérioriser ce que nous faisons actuellement, le lavage des mains, la distance sociale… Même sur les plages » a prévenu Reyes Maroto, la ministre espagnole du Tourisme, interrogée sur une éventuelle limitation de l’accès aux plages pendant la saison estivale.
Jusqu’à ce que nous ayons un vaccin, rien ne sera comme avant. Les rassemblements devront être limités pour maintenir la distance de sécurité », a-t-elle ajouté dans une interview publiée par le quotidien El Pais.
Ce n’est pas le préfet de la Guadeloupe, c’est donc la ministre espagnole du tourisme qui veut interdire l’accès des plages ou les réglementer en tout cas, même à partir de juillet.
Je pointe déjà les réactions indignées. Un argument de taille à opposer à ce genre de décisions serait que les écoles seront ouvertes dès mai en France, et que l’activité reprend en Espagne.
N’y-a-t-il pas deux poids, deux mesures ?
Nous pouvons seulement répondre, puisque nous ne sommes pas experts, que la pratique de sport à l’air libre serait encore plus dangereuse que d’être assis à un mètre d’une personne, puisque les épidémiologistes nous ont déjà indiqué que pour la pratique d’un footing, les mesures de sécurité à respecter devraient être au minimum de de 8 mètres.
Mais peu importe, d’ailleurs ! Ce que nous voulions souligner, c’est l’extrême légèreté de ceux qui sont aux premières places de l’aéropage politico-administratif de l’île.
Tournons-nous maintenant vers le président de région. Comme les commentateurs l’écrivent pour Boris Johnson, il a beau être au centre de la scène, Ary Chalus reste une énigme. Il se plaît à brouiller les pistes. Ses manières, mélange de verbe fort et d’approximations linguistiques, déroutent et mettent en déroute même ses plus fervents supporters.
Ce n’est pas être méchant que d’être sidéré par son incapacité à maîtriser le b.a.ba d’un discours de lutte contre le COVID-19.
A moins que vous considériez que les propos (fictifs) suivants tenus entre le président de la région et le directeur de l’Organisation Mondiale de la Santé soient de nature à faire en sorte que nous ayons plus de masques pour nos soignants et simplement pour nous aussi, citoyens.
– M. le Pdt de Région, pouvez-vous me confirmer le nombre de guadeloupéens infectés par le virus ?
– M. le Directeur, le nombre de guadeloupéens… affectés par le virus est de 148.
– Oui, malheureusement, ils sont affectés dans leur vie économique, sociale, professionnelle. Quelle terrible épreuve pour la planète ! J’aurais même pensé qu’ils seraient plus nombreux. Mais donnez-nous plus de précisions sur le nombre de personnes infectées ?
– Oui, le nombre de personnes… affectées est de 148.
– Vous me confirmez vraiment ces chiffres ?
– Je ne dis pas de bêtises. Personnes… affectées : 148
– J’en suis heureux, M. le Pdt de Région. Je crois que j’ai lu de travers les chiffres communiqués pour la Caraïbe, et plus particulièrement pour la Guadeloupe. C’était pour une livraison de masques.
La vidéo dans laquelle Ary Chalus s’emmêle les pinceaux entre les termes infecté et affecté, est surréaliste et interroge sur l’efficacité de son service communication. Mais puisqu’en Guadeloupe, tout parait se gérer sur le plan de l’affectif, peut-être voulait-il dire que non seulement le malheureux citoyen guadeloupéen est affecté, mais qu’il est infecté de surcroît, que le virus n’est vraiment pas affectueux, et que l’habitant sera soigné dans des locaux infects, qu’il n’affectionnera pas, en dépit du professionnalisme et du dévouement des soignants.
Est-il un génie de la politique comme Boris Johnson dans lequel ses partisans voient un combattant, un pourfendeur de vieilles habitudes politiques ? Ou pour ses détracteurs, qui reprennent les mêmes termes employés par les critiques de Boris Johnson, serait-il un dangereux populiste ou un bouffon ? Ajoutons tout de suite que nous évacuons fermement cette dernière hypothèse.
Les journalistes lors de sa dernière prise de parole sur le programme économique de la région, ont été étonnés, selon eux, par sa capacité à tenir une heure sans notes. Développements brillants, argumentation claire. Alors où situe le marqueur ?
En fait, nous le verrions bien faire de cette phrase de Nicolas Machiavel, « une patrie est défendue soit par l’ignominie, soit par la gloire, soit par tout autre moyen », sa devise. Sa posture guerrière sur le déconfinement du 11 mai » inconcevable » en Guadeloupe en est l’exemple parfait.
Pour nous, ces séquences vidéo nous éclairent. Nos leaders font fausse route. Ces exemples démontrent, comme sur le divan d’un psychanalyste, à quel point nos décideurs avaient totalement occulté de leur programmation politique, l’environnement, les risques sanitaires.
Regardez comment nous nous égosillions depuis maintenant près de cinq ans à 97Land à mettre l’accent sur la dangerosité des paquebots, que ce soit en matière épidémiologique ou au niveau environnemental.
L’épidémie de coronavirus a écorné l’image des paquebots, dépeints en redoutables foyers de contagion par les experts.
Ces bateaux sont d’excellents vecteurs pour des épidémies, qu’il s’agisse de simples rhumes ou de gastro-entérites, rougeole, varicelle, intoxications à la bactérie Ecoli ou à la salmonelle. Immanquablement ces bateaux sont surpeuplés, nous précise John Oxford, professeur de virologie à l’université Queen Mary de Londres.
Que nous ayons échappé à la situation du Ruby Princess, amarré au sud de Sydney (Australie), est un miracle quoique nous ne sachions pas tout ! Un bilan provisoire fait état de plus de 600 malades et de 21 morts parmi les croisiéristes. Restés à bord, des membres d’équipage sont également infectés.
Nous n’allons donc pas cesser de marteler que l’agrandissement de l’aéroport en Guadeloupe n’est pas une nécessité vitale. Notre-Dame des Landes est passée aux oubliettes. Combien de fois ceux qui étaient à la tête de cette région n’ont cessé de pleurnicher pour asséner que c’était une urgence, la condition sine qua non d’un développement harmonieux !
La Norwegian a annoncé lundi la mise en faillite de quatre de ses filiales. Mardi, Virgin Australia déjà en difficulté avant la crise mondiale, est devenue la première grande compagnie aérienne à s’effondrer sous le choc du coronavirus. Nous vivons en direct le crash d’une industrie.
Selon les spécialistes, le transport aérien mettra au moins trois ans pour sortir de la crise, et la moitié de compagnies aériennes auront disparu en juin.
Le coronavirus nous démontre bien toutes les inepties de nos soi-disant experts en développement, dans une Guadeloupe immobilisée et à l’arrêt ! Le coronavirus démontre également la folie de la politique régionale consistant à vouloir absolument atteindre le chiffre d’un million de touristes en Guadeloupe. Nous aurions besoin au contraire d’un tourisme plus sélectif, respectueux des paysages et des gens.
Imaginez qu’une catastrophe se produise en Guadeloupe ? Les hôpitaux n’ont même pas assez de lits pour soigner les habitants.
Il ne fait plus de doute qu’une autre politique est impérative, sinon nous allons tous plonger dans le précipice. Pourquoi le cauchemar visuel actuel de la zone de la Lézarde à Petit-bourg ne pourrait-il pas être reconfiguré en une merveilleuse rivière protégée ? Pourquoi tout ne serait-il pas fait pour que la zone de Jarry ne soit pas citée dans le monde entier comme l’exemple de ce qu’il ne fallait pas faire ?
Car il faudra bien un jour que nos décideurs rendent des comptes en ce qui concerne Jarry.
Pourquoi la zone de Jarry n’a-t-elle pas encore fait l’objet d’une décision d’arrêt définitif de toute construction ? Attend-on de compter les morts comme pour le coronavirus ? Tremblements de terre, tsunami.
Les législations européennes et nationales prévoient que les opérations susceptibles d’affecter l’environnement, font l’objet d’un processus d’autorisation spécifique, assurant :
Une garantie de prise en compte des sensibilités et enjeux environnementaux considérés dans une conception extensive (biodiversité, climat, ressources naturelles, risques naturels et technologiques, pollutions et nuisances, risques sanitaires etc), une garantie de bonne information du public dès le stade en amont des projets, appuyée sur le principe européen de participation nécessaire du public aux choix susceptibles d’affecter l’environnement.
La crise du coronavirus n’est qu’un des multiples défis environnementaux, écologiques, sanitaires, épidémiologiques, auxquels nos décideurs sur nos territoires seront confrontés.
Mais nos décideurs ont-ils jamais écouté ? Ecoutent-ils ? Ecouteront-ils ?
Sur un territoire exigu, on a beau leur suggérer que les politiques entamées sont perverses et que le leader devra contrôler un monde de plus en plus complexe, ils ne se sont pas encore mis à niveau pour saisir que de plus en plus de leaders et dirigeants dans le monde trouvent une cohérence entre leur discours et leurs actions ainsi qu’une harmonie entre une vision environnementale forte et leur mission.
L’impression qu’ils donnent, combien de fois nous l’avons déjà signalé, c’est d’être des bureaucrates dociles, du bétonnage en règle, des investisseurs en complexes cinématographiques, de projets mirifiques et calamiteux de golfs en montagne, j’arrête là la liste.
Alors que partout ailleurs, l’invention de modèles nouveaux, l’innovation et la créativité ont la côte. On parle du plaisir de savourer le temps, les êtres, et les choses, et on suggère que ce plaisir remplace peu à peu la frénésie de les consommer (car malheureusement existe aussi la consommation des êtres, et pas seulement des choses).
L’action politique et la connaissance sont désormais physiques, sensuelles, affectives, bien avant que d’être cognitives, selon Antonio R. Damasio. La gestion politique doit être un art, non une science. La rigueur de l’art sied mieux pour parler de leadership que les pseudo-sciences de la gestion. Le rêve et le fantasme font partie intégrante de la pensée et de l’action.
Pourquoi le rêve et le fantasme n’auraient pas droit de cité en Guadeloupe ?
Les défenseurs de l’environnement en Guadeloupe ne cessent de remporter des batailles, contre le projet de circuit moto dans la mangrove, contre le projet de golf à Petit-Bourg.
Dans Leadership et développement durable, paru dans la revue Cairn Info, Aude Porcedda et Laurent Lapierre, soulignent que leurs réflexions se veulent pamphlétaires et non méprisantes quant à la valeur des transformations en cours. Nous pourrions ajouter que nos réflexions se veulent également pamphlétaires et non méprisantes quant à la valeur des femmes et des hommes qui gèrent cette terrible épreuve sur nos territoires. Comme le mépris n’est ni dans notre tempérament, ni dans notre ADN, nous faisons nôtre cette articulation de la pensée de ces sociologues, et nous essayons d’apporter notre contribution à une remise en question qui s’avère dorénavant impérieuse.
Mais pawol ka fè pawol. Cédons la place au grand Patrick Saint-Eloi :
Sa nou bizwen sé filosofi – Sé on moun dè pè
Sa nou bizwen sé on bel lanmou – Pou lemond pé chanjé…
Sa nou bizwen sé on charpantié – Sé moun ka woulé
Sa nou bizwen sé on mémwa – Sa nou bizwen sé on vérité
Sa nou bizwen sé on bon lespri – Pou tou sa pé chanjé
Onlo senplisité – Sa ké alé ti bwen mié…
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