Société

Nous ne reconnaissons pas le résultat de ce référendum, qui est bidon

Charles Wea, envoyé du FLNKS à l’ONU, de passage à Paris, a répondu aux questions de Joseph Confavreux pour Mediapart, après les résultats de la 3ème consultation. Des extraits de son interview.

« Nous ne reconnaissons pas le résultat de ce référendum, qui est un référendum bidon.

Nous sommes satisfaits de voir que la participation dépasse à peine les 40 %, ce qui montre que le mot d’ordre du FNLKS de ne pas participer à ce scrutin a été très bien suivi.
Mais cette satisfaction s’accompagne du fait que, lors de ce scrutin, le peuple kanak a été humilié par l’État français, qui a maintenu cette date du 12 décembre, en dépit des demandes de le repousser à septembre 2022. Une décision allant à l’encontre de la promesse initiale de tenir ce référendum avant septembre 2021 ou après juillet 2022, pour ne pas interférer avec la campagne présidentielle, et incompatible avec la situation sanitaire en Nouvelle-Calédonie, qui est toujours confinée.

Nous n’avons pas été pris en considération dans le cadre du processus du décolonisation mis en œuvre par l’État français et il est insensé d’avoir tenu un tel référendum sans le peuple colonisé.

L’avenir de la Nouvelle-Calédonie ne peut pas se faire sans les Kanak. Même si aujourd’hui la droite calédonienne dit que c’est fini, que le 3ème référendum règle la question, et que le président de la République embraye sur la droite locale en disant « la Nouvelle-Calédonie restera française », c’est faux.

Nous sommes captifs d’une géopolitique globale

Nous avons senti un changement de méthode avec l’arrivée du nouveau premier ministre Jean Castex, et surtout celle de Monsieur Lecornu au ministère des outre-mer. Le comité des signataires, qui se réunissait régulièrement pour accompagner la mise en œuvre des accords de Nouméa, a été mis en sommeil. On a senti chez lui une stratégie consistant à tourner la page de l’indépendance avant l’élection présidentielle française…

Plus structurellement, la France est en train de changer de cap et de reconstruire sa diplomatie pour maintenir sa présence dans le cadre indo-pacifique, surtout après l’affaire des sous-marins et le conflit avec l’Australie… Nous sommes captifs d’une géopolitique globale et d’une restructuration diplomatique plus générale.

Le FLNKS a décidé de ne plus rien négocier plus avec ce gouvernement et le ministre Lecornu. On attend le nouveau gouvernement qui sortira des élections présidentielles en avril prochain. Nous engagerons alors de nouvelles discussions sur les bases prévues par les accords de Matignon et de Nouméa, à savoir l’accession à la pleine souveraineté. Ce sont les bases de la future discussion. Même si nous garderons, bien sûr, des relations privilégiées avec la France…

Les leaders loyalistes sont pétris d’une idéologie néocoloniale

Sur le poids croissant des « coutumiers » sur les « politiques » parmi les indépendantistes, Charles Wea répond : « Parmi les 280 morts, plus de 70 % de Kanak. Et nous avons tous perdu des membres de notre famille. À notre échelle, le chiffre est important et la coutume essentielle. Mais surtout, on a bien vu avec le progrès des votes pour le « oui » entre la 1ère consultation et la 2ème, avec plus de 46 % de votes pour l’indépendance, qu’il fallait que nous puissions aller voir les gens un à un, pour les convaincre du bien-fondé de notre projet. Mais le Sénat coutumier n’a pas interféré dans la campagne, il est resté dans son rôle en rappelant l’importance de l’identité kanak auprès des institutions et, en l’occurrence, l’importance de respecter nos traditions en cas de décès.

En ces temps de deuil, les conditions pour mener une telle campagne n’étaient donc pas réunies. Le problème est qu’en face, les leaders loyalistes n’ont pas la mémoire des événements des années 1980 et sont pétris d’une idéologie néocoloniale en décalage total avec la réalité du pays ».

Nous serons très durs vis-à-vis de l’État français qui nous a trahis

« Nous avons demandé à tous nos jeunes de garder le calme, pendant le déroulement du scrutin et après, en dépit de la militarisation de l’archipel par l’État français, qui a fait venir 3 000 militaires pour sécuriser le scrutin, avec du matériel lourd, qui ne contribue pas au besoin d’apaisement dont a besoin la Nouvelle-Calédonie.

Mais il est malheureux d’en arriver là. On ne va pas lâcher l’affaire. Nous allons adapter notre stratégie en fonction de la situation. Et nous serons très durs vis-à-vis de l’État français qui nous a trahis. »

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1 Comment

  1. Robert ZAMORE
    décembre 15, 2021 at 00:11 — Répondre

    La Guadeloupe dans le tourmente

    Les problèmes de la Guadeloupe sont liés à un certains nombre de facteurs dont il est fait peu mention à savoir:
    Les quarante pour cent de vie chère.
    Le mode de financement de la Sécurité sociale.
    La fiscalité locale.
    La modalité des droits de succession.
    L’absence d’unité administrative efficace.
    Je reste à votre disposition pour argumenter ces propos.

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