Société

Lettre ouverte pour la nommination de nouveaux Préfet et Directeur de l’Ars

Lettre ouverte à Monsieur Emmanuel MACRON, Président de la République, pour demander la nommination d’un/e nouveau/elle Préfet/ète et d’un/e nouveau/elle Directeur/trice de l’Ars en Guadeloupe.

 

Monsieur le Président,

En tant que citoyen français et surtout Guadeloupéen vivant en Guadeloupe et témoin Covid attentif depuis Mars 2020, permettez-moi, conformément aux libertés que me garantit la Constitution, de vous interpeller respectueusement sur un détail de la situation particulière que vit la Guadeloupe par rapport à la Covid 19.

Je suis un écrivain, traducteur, éditeur, “lokansyè“, conteur et comédien professionnel de langue créole, c’est-à-dire un farouche observateur de la société contemporaine en général, de la société guadeloupéenne en particulier, car je nourris mes œuvres partiellement des réalités humaines et sociales que je constate ou dont j’entends parler, notamment dans la presse locale, nationale et internationale… Je voudrais vous parler de notre déception de certaines décisions prises par Monsieur le Préfet et Madame la Directrice de l’Ars en octobre 2021.

Comme vous le savez, Monsieur le Président, au mois de juin 2021, nous sortions avec fierté d’un confinement éprouvant, mais toute la Guadeloupe était alors remplie d’espoir. Or, la situation sanitaire a commencé rapidement à se dégrader en juillet, jusqu’à un point critique où la Préfecture et l’Ars ont été amené à nous reconfiner début Août 2021 pour trois semaines.

Cependant, cette situation sanitaire a continué à se détériorer, et ce nouveau confinement a été régulièrement prolongé jusqu’au 8 octobre 2021.

Rappelezvous, Monsieur le Président, que Madame la Rectrice d’Académie a même été obligée de prendre la difficile mais sage décision de reporter la rentrée scolaire au 13 septembre. Or, nous nous sommes collectivement comportés de façon exemplaire pour parvenir à endiguer la propagation de l’épidémie, si bien que début octobre, la Préfecture et l’Ars ont sérieusement commencé à envisager de mettre un terme à cet énième confinement. Ce fut donc chose faite le 8 octobre, en semaine Covid-39, après sept semaines consécutives de baisse des contaminations, pour un début de déconfinement qui allait être progressif, nous a-t-on expliqué. Nous y avons consenti, de nouveau remplis d’espoir de reprendre une vie à peu près normale, après tant d’efforts et de sacrifices, mais aussi après tant de pertes de vies humaines.

Cependant, Monsieur le Président, Monsieur le Préfet et Madame la Directrice de l’Ars n’ont pas décidé, à cette date du 8 octobre 2021, d’instaurer – ont-ils sollicité leurs autorités de tutelle à ce sujet ? –, une obligation de tests PCR pour les voyageurs arrivant en Guadeloupe en provenance de la France hexagonale avant embarquement.

Naturellement, les Guadeloupéens ont vivement et immédiatement protesté contre cette décision – en réalité cette non-décision –, aussi bien les simples citoyens que les élus dont notamment de nombreux maires et Monsieur le Président du Conseil régional entre autres. Je suis moi-même alors intervenu sur les ondes d’une grande radio locale pour appeler Monsieur le Préfet à protéger la population guadeloupéenne en mettant sans délai en place cette mesure que toute la Guadeloupe réclamait et exigeait, sur les réseaux sociaux, sur les ondes, et dans toute sorte de discussions, malheureusement en vain.

Il a fallu attendre le 24 Novembre, c’est-à-dire plus de sept semaines plus tard, suite à une question au Gouvernement de notre valeureux sénateur Victorin Lurel conscient et inquiet des risques d’une cinquième vague de Covid 19 en Guadeloupe, pour que cette obligation soit rétablie par le Gouvernement, concrètement à partir du 29 novembre.

Selon mon analyse, il s’agit de facto d’un désaveu du Gouvernement au Préfet et à la Directrice de l’Ars de Guadeloupe. En effet, si le Gouvernement rétablit, après sept semaines de protestation et de demandes officielles qui n’ont jamais été prises en compte par les deux intéressés, cette mesure de bon sens mais surtout de protection de la population guadeloupéenne, mesure non prise par Monsieur le Préfet et Madame la Directrice de l’Ars le 8 octobre 2021, il faut en déduire soit une négligence de leur part, soit de l’incompétence, soit de la malveillance (avec tout le respect que je pourrais leur devoir), soit un abus d’autorité, en tout cas un manque d’écoute évident de nos doléances, mais aussi un manque flagrant de respect de la population guadeloupéenne, un manque de concertation avec nos élus et les corps constitués qui ont tous envoyé des demandes officielles à Monsieur le Préfet et à Madame la Directrice de l’Ars qui n’ont, à aucun moment, laissé entrevoir qu’ils allaient prendre en compte cette demande légitime, car nous comptons encore nos morts de Juillet, d’Août et de Septembre 2021, et nous accompagnons encore des milliers de familles endeuillées par la Covid 19.

Monsieur le Président, nous savons tous aujourd’hui, suite aux nombreuses explications des scientifiques, que les personnes vaccinées tout comme celles qui ne le sont pas peuvent être porteuses du virus, et, par conséquent, le transmettre. Il va donc de soi qu’en rouvrant les “frontières“ de la Guadeloupe à partir du déconfinement du 8 octobre 2021 sans mettre en place cette mesure de protection des populations présentes sur le territoire de la Guadeloupe et de ses îles du Sud, Monsieur le Préfet et Madame la Directrice de l’Ars ont mis en danger de facto ces populations ainsi que le peuple guadeloupéen dans son ensemble.

À preuve, au cours de la semaine 43 (du 25 au 31 octobre 2021), les cas de Covid 19 sont repartis à la hausse (184 cas contre 172 pour la semaine 42). Pire : au cours de la semaine 45 (du 8 au 14 Novembre 2021), il y a eu 221 cas contre 168 pour la semaine 44. Cette reprise de l’épidémie n’est certes pas due exclusivement à l’arrivée massive de touristes en provenance de la France hexagonale, mais tout de même… Tout de même… Quelles preuves les “autorités“ ont-elles a contrario pour combattre cette pensée, voire cette certitude des Guadeloupéens, sans ces fameux tests PCR que nous réclamions à cor et à cri depuis tant de semaines ?

J’ai donc l’honneur, Monsieur le Président, de vous demander de bien vouloir prendre en considération cette demande que j’exprime en mon nom personnel, en ma qualité d’écrivain et d’observateur guadeloupéen, certes, mais que semblent partager beaucoup de mes compatriotes, sans qu’ils osent pour autant s’adresser directement aux autorités de la République, sans doute par crainte de représailles, ou par peur de se livrer en pâture aux inconditionnels de Monsieur le Préfet et de Madame la Directrice de l’Ars qui, nous le savons et en sommes conscients, sont de très puissants personnages de l’appareil d’État…

Après cette mise en danger de nos vies par Monsieur le Préfet et Madame la Directrice de l’Ars, mise en danger même involontaire s’il en est, nous ne pouvons plus faire confiance à ces deux capitaines, et je vous demande donc instamment d’avoir le courage et la bienveillance de nous les remplacer, en leur octroyant, pourquoi pas, une promotion en France hexagonale par exemple ?, peu importe, mais en envoyant en Guadeloupe un/e préfet/ète et un/e directeur/trice de l’Ars qui soient certes compétents, mais surtout qui aient de la compassion, qui soient en empathie avec le peuple guadeloupéen, et qui voudront vraiment œuvrer de toutes leurs forces, de tout leur cœur et de toute leur intelligence, en accord avec nos élus, à nous protéger contre une reprise de l’épidémie.

De plus, Monsieur le Président, vous avez à la disposition de l’État à n’en pas douter un certain nombre de Guadeloupéens parfaitement capables, à mon humble avis, de remplir honorablement ces deux fonctions ô combien importantes dans la vie des Guadeloupéens, surtout en ces temps si difficiles en particulier pour nous Guadeloupéens.

Souvenez-vous, Monsieur le Président, de votre score en Guadeloupe, au premier tour des élections présidentielles de mars 2017, où les électeurs guadeloupéens vous ont placé largement en tête parce que nous croyions en vous à l’époque…

L’histoire va-t-elle de nouveau nous prouver que nous nous sommes encore trompés sur le compte des candidats aux élections présidentielles ? Je ne pense manquer de respect à personne, ni à Monsieur le Préfet, ni à Madame la Directrice de l’Ars, ni à la République française dont je fais moi aussi partie (jusqu’à nouvel ordre). Au contraire, je pense être la voix de ces nombreuses personnes qui se libèrent par la parole sur les ondes et sur les réseaux sociaux, mais qui n’osent pas s’adresser officiellement aux autorités, ni locales, ni nationales.

Par conséquent, j’espère que vous me ferez l’honneur de prendre au sérieux ma demande à la fois pour ma propre satisfaction et mon propre soulagement, mais aussi pour la satisfaction et le soulagement de tous les Guadeloupéens qui craignent si fortement une cinquième vague, et qui continuent à appliquer quotidiennement les gestes barrières afin d’éviter de favoriser la reprise de la circulation du virus.

Dans l’espoir d’une suite favorable à cette lettre ouverte, je vous prie de croire, Monsieur le Président, en l’expression des mes sentiments les plus dévoués.

 

Djant D. M’BITAKO.

Previous post

Déclaration du Collectif des Organisations en lutte

Next post

O konba èvè pèp en nou

97land

97land

Des infos, des potins, des événements... Toute l'actu du 97.

1 Comment

  1. eric alibar
    novembre 29, 2021 at 02:28 — Répondre

    Oui monsieur M’Bitako, dont j’ignorais l’existence jusqu’ici ; je dois dire à mon corps défendant que je ne suis pas les actualités des Arts de mon pays.
    Cependant néanmoins dans cette Lettre au Président
    exprimant des doléances parfaitement légitimes,
    Je relève l’omission d’une composante, d’un maillon essentiel de cette chaîne de protection (gestes barrières, tests, dépistages) : le vaccin anti covid-19 ;
    Au 17 novembre 2021, le Taux de couverture vaccinale (au moins une injection) des personnes de plus de 18 ans en Guadeloupe est de 46,43 %

    À la fin du mois de Juillet En Guadeloupe, seulement 15,8% de la population est primo vaccinée
    (Source : https://www.lexpress.fr/actualite/societe/sante/covid-19-pourquoi-la-quatrieme-vague-est-plus-virulente-en-outre-mer-qu-en-metropole_2155864.html )
    Au cours du mois d’août, il tourne autour des 16% en Martinique, Guadeloupe et Guyane, contre un peu plus de 60% à l’échelle nationale.
    (source :https://la1ere.francetvinfo.fr/comment-expliquer-le-faible-taux-de-vaccination-dans-les-antilles-1073659.html)
    C’est cette dernière période que vous pointez je crois
    Pour faire bref le fond de ma pensée est que l’ on ne peut pas toujours nous prendre par la main et nous surprotéger en agissant pour nous et à notre place ;
    si notre engagement notre mobilisation pour x raisons tout aussi légitimes soient-elles n’est pas suffisant, l’on pense bien que le virus lui, n’est pas aussi transigeant, aussi nuancé et possède encore moins d’empathie ;
    C’est de ce maillon dont je veux parler
    en conclusion nous avons peut-être un peu laissé faire , pensant que tout allait se résorber de soi-même, avec enfoui dans nos esprits l’espoir que l’État d’un coup d’un seul allait pouvoir trouver la solution, à coup de Décrets, à coup de fermeture des frontières, et autres dispositifs plus ou moins contraignants ;
    J’étais fortement choqué lors du premier déconfinement du 11 mai 2020 quand un grand nombre un grand nombre de jeunes notamment à Saint-Martin croyant que le virus avait quitté l’île dans la nuit du 10 au 11 se sont retrouvés 48 heures après à plusieurs centaines sans protection sans masque dans une promiscuité effarante, une espèce de « Mercury Day » improvisé…
    Le résultat : création immédiate d’un cluster !!
    À qui la faute ?
    Avons-nous déjà vu monsieur le Préfet de Région ou Madame la Directrice de l’ARS laisser leur masque anti covid-19 pendre au rétroviseur de la voiture ou attaché sous le bras pendant toute la journée ou carrément baillant sous le menton le rajustant comme l’on peut?
    J’avais dit que je faisais bref j’ai failli manquer à ma parole
    je termine : pour moi il s’agit vraiment de coopérer et non pas de relation de force ou d’opposition de principes ou d’idéologies :
    « Vous fermez les frontières , pendant que l’on se protège au maximum »
    c’est ainsi que j’entends la coopération
    Pour résumer, « aide-toi le Ciel t’aidera » je crois que ça c’est compréhensible par tout un chacun du plus jeune au plus vieux ; je ne fais pas la morale, et d’autre part je peux me tromper ;
    ce n’était juste que mon avis de citoyen.

Leave a reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *