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Les Indiens des Etats-Unis avaient des esclaves noirs !

Les Indiens des Etats-Unis avaient des esclaves noirs. C’est « l’autre péché originel de l’Amérique », un double péché originel : de la part des Blancs, et aussi des Indiens d’Amérique.

Non seulement les Européens ont réduit les Indiens en esclavage, mais ils les ont incités à participer au commerce d’êtres humains.

L’esclavage pratiqué par les tribus amérindiennes avant l’arrivée des Européens était divers. Il relevait de logiques familiales, reproductives ou diplomatiques, et ne se limitait pas à l‘extraction d’une main-d’œuvre domestique ou agricole, comme la traite négrière (Slate du 23/10/2016). Ainsi, par exemple dans son ouvrage, « l’empire comanche », l’historien Pekka Hämäläinen détaille le recours à l’esclavage par les Comanches pendant l’apogée de leur domination sur le sud-ouest américain, basée sur leur supériorité numérique. Ils faisaient passer leurs captifs par tout un processus d’asservissement rigoureux, une initiation déshumanisante qui voyait les non-Comanches, perdre leur nom, être tatoués, frappés, mutilés et affamés.

S’agissant cette fois des amérindiens eux-mêmes mis en esclavage par les Européens, l’historien Brett Rushforth a essayé d’établir le bilan total de cet esclavage, et il estime qu’entre 2 et 4 millions d’autochtones ont été réduits en esclavage en Amérique du Nord et du Sud, soit un chiffre bien plus élevé que ce qu’on pouvait escompter, même s’il est inférieur aux 10 millions d’individus africains déportés sur le continent américain.

Les cinq tribus du sud-est des Etats-Unis furent encouragées à pratiquer l’esclavage par les Blancs qui considéraient que leur participation à l’asservissement des Noirs allait les civiliser.
C’est pourquoi on les avait nommées les cinq tribus civilisées : Cherokees, Chicachas, Chactas ou Choctaws, Creeks, Séminoles.

Un petit rappel historique permet de comprendre ces incroyables forfaitures de l’Histoire.

Andrew Jackson, président de 1829 à 1837 qui a signé le Indian Removal Act, est à l’origine de la déportation à l’ouest du Mississipi de tous les Indiens vivant à l’Est du grand fleuve. La déportation fut connue sous le nom de Trail of Tears, le Sentier des Larmes.
Les tribus expulsées avaient amené leurs esclaves avec elles. Cette déportation causa la mort de plus de 11 000 indiens, dont 2000 à 4000 cherokees. « Du nègre esclave chez les Peaux-Rouges », le Bulletin et Mémoires de la Société d’anthropologie de Paris, année 1864, évoquait ce curieux paradoxe. Sur les 4500 à 5000 Noirs esclaves dans les nouveaux territoires indiens en 1839, la grande majorité était métissée.
En effet, les Cherokees et les autres tribus s’étaient intégrés à l’économie basée sur la culture du coton. Avant la guerre de Sécession, ces tribus indiennes du sud des Etats-Unis avaient des esclaves noirs.

@Du nègre esclave chez les peaux rouges – Bulletins et Mémoires de la Société d’Anthropologie de Paris 1864

Par un curieux renversement de l’Histoire, les cinq tribus se sont alliées aux troupes confédérées, (rappelons que les troupes confédérées luttaient pour le maintien de l’esclavage), parce que le gouvernement fédéral les avait chassées de l’est du Mississipi.

Après la guerre civile américaine, ces freedmen (affranchis ) ont été émancipés et autorisés à devenir des citoyens de la nation cherokee. Mais en 2007, les membres de la nation ont voté massivement pour exclure ces 2800 descendants d’affranchis, définissant la citoyenneté tribale comme « étant par le sang ».
On leur déniait leur citoyenneté cherokee à cause de leur race.

Le 30 août 2017, un tribunal fédéral s’est rangé du côté des Cherokee freedmen, descendants d’esclaves afro-autochtones qui réclamaient le rétablissement de leur citoyenneté tribale qu’on leur avait enlevée.

La nation cherokee peut continuer à se définir, mais elle doit le faire de la même manière et avec impartialité en ce qui concerne les Cherokees et les descendants des affranchis cherokees » a déclaré le juge.

Norman Lester dans le Journal de Montréal cite l’ancienne chef principale des Cherokees, Wilma Mankiller, qui a écrit dans son autobiographie : « La vérité est que la pratique de l’esclavage jettera à jamais une ombre sur la grande nation cherokee ».
Symbole de deux causes perdues, pour lesquelles il a lutté, Stand Watie, le dernier général confédéré (sudiste) dépose les armes et se rend avec le reste de ses troupes aux forces de l’Union, deux mois après la capitulation.

Il a la particularité d’être le seul indien à avoir atteint le grade de général durant la guerre de Sécession. Il est né d’une mère à moitié blanche et d’un père cherokee. Son oncle paternel est un leader cherokee respecté, Major Ridge.

Après la signature du traité, par lequel la nation Cherokee cédait ses terres ancestrales en échange d’argent et de terres dans le Territoire Indien (actuellement état d’Oklahoma), des factions rivales vont s’opposer violemment jusque vers les années 1840.

Les signataires du traité seront assassinés par des vengeurs sauf Stand Watie qui a été averti et peut s’enfuir.
Vivant à l’occidentale, il est éduqué, riche planteur, et possède de nombreux esclaves.
Lorsque la guerre de Sécession éclate, il s’engage pour le Sud, espérant peut-être, en échange de son soutien, obtenir l’indépendance pour la Nation qu’il représente. (On peut se reporter à la revue Hérédote, pour son parcours improbable qui dépasse tout ce que l’imagination humaine peut concevoir).

Deux grands musiciens afro-américains, le saxophoniste Charlie Parker et le guitariste Jimi Hendrix ont eu pour points communs d’avoir comme mères des femmes issues de ces communautés, la première était d’ascendance Choctaw, la seconde Cherokee.

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Théo LESCRUTATEUR

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