L’antillais briseur de statues, un amoureux fou de la France ?
Mes compatriotes après lecture me jetteront-ils dans un champ de cannes avant d’y mettre le feu pour avoir abordé ce délicat sujet : l’activiste antillais, briseur de statues est-il un amoureux fou de la France ?
« Le même supporter fanatique du PSG ou de l’OM, sans même parler de l’équipe de France va approuver bruyamment sur Fessebouc les déboulonnements de statues ou les blocages des supermarchés », comme le démontre malicieusement un article d’un site martiniquais du 21 août 2020.
Puisque la perche nous était tendue, nous avons recherché les sources psychanalytiques de cette dualité. L’ambivalence des sentiments, cette caractéristique banale de l’espèce humaine, peut devenir un déchainement fou de sentiments, prendre une allure délirante ; l’objet de l’amour, comme celui de la haine, occuper une place psychique permanente nous prévient Viviane Abel Prot*. On comprend alors pourquoi certains rebelles ne parleront pas de la Caraïbe, de la Dominique ou de Sainte-Lucie, ni des problèmes sociaux, économiques, de délinquance, sur nos îles, mais en permanence de l’ennemi institutionnalisé, la France, à 7000 kilomètres. Toutefois notons que d’autres soulèvent à juste titre les questions lancinantes concernant la survie même de nos territoires, comme le chlordécone, ou le saccage écologique tout en dénonçant le colonialisme qui suinterait par tous les pores des institutions néo-esclavagistes, mais revendiquent en même temps des crédits relatifs à des statuts « nationaux ». Ainsi le Parc naturel de la Martinique n’a pas un statut de parc national, mais celui d’un parc régional. Il ne peut donc pas être bénéficiaire des sommes allouées à ces parc nationaux.
Haïr pour ne pas succomber à l’amour, pourrait-on dire.
Les démarches tant prisées sur les réseaux sociaux, – et qui sont devenues l’ADN de certains sites -, dénonciation permanente d’un suprématisme ethno- administratif, « nous sommes à Soweto », glorification des pasionarias de la cause, permettent ou plutôt imposent au « moi » de rester à la surface, et d’être encore plus étranger à lui-même, si on suit le raisonnement de notre psychiatre Viviane Abel Prot.
Elle souligne que Freud avait adopté avec enthousiasme « l’excellent terme, l’heureuse dénomination », d’ambivalence que Bleuler développera dans la « Démence précoce ou groupe de schizophrénies » paru en 1911.
Car seule la potentialité d’ambivalence vis-à-vis de nos objets d’amour permet d’expliquer, selon Freud, le retournement d’un sentiment en son contraire.
Bleuler évoquait trois formes d’ambivalence : l’affective, la volontaire, l’intellectuelle.
Serions-nous tous atteints de démence précoce ? Fanon est passé par là.
Le prototype de l’ambivalence affective est le couple de l’amour et de la haine. Un homme, par exemple, aime et hait sa femme. En pensant à son amant, une malade répète : « toi Diable, toi ange, toi Diable, toi ange ».
Toi le Préfet français, diable, toi le CRS français, diable, toi l’enseignant français, diable, mais toi M’Bappé, ange, toi Kingsley Coman, ange. Quoique… S’agissant de ce dernier, beaucoup ont comme reçu un coup de couteau de sa part, à en juger par les réactions désespérées des peuples martiniquais et guadeloupéen. Et certains de suspecter ce Kingsley d’avoir probablement des origines dominiquaises pour avoir brisé les rêves du club de la capitale.
L’ambivalence de la volonté ou « ambitendance » consiste à vouloir et ne pas vouloir quelque chose : le patient veut manger, et en même temps, ne veut pas manger. Il porte la nourriture à sa bouche, mais ne va pas jusqu’au bout de ses mouvements.
Il regarde les élections de Miss France, mais peste continuellement, en appelant au boycott, parce que sa représentante ne s’est pas qualifiée pour les demi-finales, puis dans les 5 dernières.
Quant à l’ambivalence intellectuelle, elle consiste en des idées incompatibles. Un patient dit à Bleuler : « Je suis un être humain comme vous bien que je ne sois pas un être humain ».
En Guadeloupe et en Martinique, cela donnera : Je suis un être humain, citoyen français comme vous, en France, quoique sur mes terres des Antilles, je ne me considère pas comme un être humain citoyen français, puisque je me revendique martiniquais ou guadeloupéen.
Cette juxtaposition des contraires a été aussi développée par Jung.
A contrario, on peut aimer pour se protéger de sa haine, et l’épanouissement amoureux devient une lutte contre la haine pressentie. L’hostilité cachée dans l’inconscient derrière un amour tendre est, écrit Freud, le cas classique, le prototype, de l’ambivalence des sentiments humains.
Et donc tous ceux qui prônent le maintien du système actuel seraient des révolutionnaires fanatiques conscients ou inconscients ? Oui, ceux qui défendent le statut départemental ou la non-évolution de l’article 73 !
Reste le cas des locaux du Rassemblement National, parfois des fanatik Kompa mais désireux de garder la Guadeloupe et la Martinique vierges de toute présence étrangère. De quoi y perdre son latin !
*Entrelacements de Viviane Abel Prot dans Libres cahiers pour la psychanalyse 2004/2 ( N°10)
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