La drogue est tellement présente qu’on ne peut plus rien faire
Certains flics tournent à la coke. Voilà qui fera bondir les syndicats de policiers, et leur hiérarchie, en Guadeloupe. C’est ce qu’affirme, en tout cas, John Châtelier, ex-policier, condamné pour trafic international de drogue.
Marié à une guadeloupéenne, il demande à la rejoindre et se retrouve très rapidement officier dans la brigade anti-criminalité BAC, en Guadeloupe, puis versé au sein des brigades de lutte contre le trafic des stupéfiants de la DIPJ (Direction Interministérielle de la Police Judiciaire), qui couvre les Antilles et la Guyane.
Comme tant d’autres, il fournit de la came à ses indics pour avoir des « crânes », des affaires, et finit par tomber en 2006. Révoqué de la police, il rentre en France. Extraits de l’article du 7/07/2017 Breizh Infos « Les souvenirs très chauds d’un policier en Guadeloupe ».
Breiz Infos : Vous êtes passé aux affaires de drogue
John Chatelier : Et pas que. Les braquages, les affaires de mœurs quand c’était une personnalité locale qui déconnait, et qu’il fallait y aller doucement sur l’enquête pour des raisons politiques, etc…Niveau drogue, on avait du lourd. A Saint-Martin, côté néerlandais, si on donnait dix balles aux flics, ils étaient contents. N’importe quoi rentrait.
B.I : Quelle était la qualité de cette drogue ?
J.C : C’était de la coke pure, pas coupée. Là-bas, on pouvait passer 4 à 5 jours sans dormir, d’ailleurs certains flics comme moi tournaient à la coke. J’ai arrêté quand je suis rentré en France, ici la qualité est trop merdique.
B.I : D’autres policiers se droguaient ?
J.C : Il arrivait qu’ils soient drogués en patrouille. A la BAC on saisissait des sacs entiers de beuh (herbe de cannabis), tout le monde ne résistait pas.
B.I : La drogue, c’était pour tenir les cadences ?
J.C : Je rentrais à quatre, cinq heures du matin, je me faisais un trait, et je repartais travailler.
B.I : Que pensiez-vous alors de l’insécurité dans les îles ?
J.C : Ça pue. Depuis ils ont augmenté les effectifs.
B.I : Que fait l’Etat ? Fort-de-France est la ville la plus criminogène de France ?
J.C : Rien. Il y a une vraie volonté politique de laisser-aller, de laxisme.
B.I : Les indépendantistes martiniquais dénoncent de leur côté les békés, les blancs, comme source de leurs malheurs.
J.C : C’est sûr qu’ils profitent du système, c’est eux qui ont les terres, les leviers du pouvoir, ils sont en place, mais les indépendantistes, aussi. Quand vous avez un indépendantiste qui se fait prendre avec des mallettes pleines de billets à la frontière entre la France et la Suisse, billets qui viennent de Métropole – c’est l’Etat qui lui a filé la thune-, et qu’il n’y a même pas de procédure, ça fait réfléchir. En fait tout le monde réclame l’indépendance mais personne n’en veut. Ce qu’ils veulent, c’est du pognon.
B.I : En Guadeloupe, la justice laissait-elle prospérer ces zones de non-droit ?
J.C : Elle ne faisait rien, oui ! Il y a des consignes politiques pour maintenir la paix sociale y compris dans les prisons.
B.I : La Guadeloupe est-elle plus criminogène qu’en Martinique ?
J.C : C’est l’un des départements les plus criminogènes de France. La Martinique, encore plus, mais nombre de délinquants passent par la Guadeloupe, cat ils y risquent moins. Il y a beaucoup de ghettos, avec des dominicains, des Haïtiens, qu’on a laissé squatter des terres et qui ont construit leurs cases. Ce sont des labyrinthes. La drogue y fait des ravages – un type sous crack peut tuer pour 10 euros, le prix d’une nouvelle dose.
B.I : Y-a-t-il une solution contre les trafics de drogue et la criminalité dans les DOM ?
J.C : A Saint-Martin, plus vraiment. Côté français, tout est à faire. La drogue est tellement présente à tous les niveaux qu’on ne peut plus rien faire pour arrêter le commerce. Donner des salaires très supérieurs aux policiers peut-être. Et encore, les cartels ont beaucoup de moyens.
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