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Antilles : les soignants non-antivax brûlent sur l’échafaud

Le bain démarré de 2022 aurait dû être le décrasseur des shrub, boudin, pois de bois, viande cochon « de nos campagnes », un bouillon de bonnes résolutions, il n’est qu’une eau saumâtre grouillant d’aigreur et de rancœurs.

Cibles d’un torrent de haine, n’ayant pas eu le temps d’être exfiltrés des hôpitaux, suite à des appels aux meurtres explicites, trois médecins sont décédés brutalement au CHU de Fort-de-France. Les chiffres terribles ne peuvent plus être tus.

Moqués, harcelés, agressés, « On va te retrouver et te mettre une balle dans la tête », France info du 2/11/2021 égrenait les suaves courriers et mails que ces soignants reçoivent désormais.

« La préfecture de Martinique a porté plainte, Les invectives ne se font pas que sur les réseaux sociaux, ils peuvent aussi s’entendre dans les centres de vaccination, à l’hôpital et même parfois entre soignants, au CHU de la Martinique.

Cela peut être sur les réseaux sociaux, ou en visuel, ou lors d’une réunion qui est interrompue. Cela peut être en croisant simplement des personnes, ou en entrant à l’hôpital, que vous êtes confrontés à des insultes ou à des menaces de mort ».

Suite à l’émotion légitime du personnel sanctionné pour non-respect de l’obligation vaccinale, si facilement captée et utilisée aux Antilles, ce dernier a-t-il estimé avoir gagné ses galons d’opprimé ? Et pouvoir se transformer en barbare ?

En premier lieu, il a défini un statut d’oppresseurs pour les médecins, infirmiers et agents qui soignent les malades dans les hôpitaux !

lI n’a pas cadenassé de préfectures ou sous-préfectures, il n’a pas boxé les vigiles de ces préfectures, mais les frêles internes apeurés, il a injurié les mamans de ceux qui nous sauvent au quotidien.

Et des femmes ont applaudi ce déchaînement de violence, elles ont piétiné leurs consoeurs, elles ont hurlé dans les couloirs devenus de la mort.

Ce n’est malheureusement pas une métaphore. Un médecin du CHU a raconté sur Martinique la Première sa détresse, à la vision de grévistes faisant régner la terreur, invectivant, alors qu’à côté d’eux des malades agonisaient, et que ne leur était même pas accordée la simple chance de partir pour d’autres cieux dans le silence et un peu de paix.

Nous possédons tous en nous un pervers ou un barbare potentiels, d’autant plus que nos îles désormais sont uniquement peuplées de victimes autoproclamées.  

Il nous est arrivé à tous de connaître la tentation infernale consistant à devenir un tyran pour céder aux vœux insconscients de notre entourage.

Il est tentant d’être un tyran avec l’assentiment d’autrui, même si on doit en devenir l’esclave.

Tout comme il est tentant de devenir la victime qui manipule son monde, mais que personne n’ose critiquer parce qu’elle est une victime.

La victime qui a manipulé son monde, c’est bien sûr le personnel soignant opposé à la vaccination. Il s’est érigé en victime expiatoire et a brandi sa souffrance. Il est devenu  également manipulateur.

Un manipulateur ment, nie la réalité et crée délibérément les conflits dont il se nourrit. Pire, il vous ligote dans vos valeurs humanistes, et les détourne à son profit.

On ne peut pas être neutre dans une situation de manipulation. Si vous ne défendez pas vigoureusement le camp des victimes, vous devenez complice.

Dans la conquête de notre identité, le premier geste consiste à refuser de s’identifier à ce double pervers. 

On sait que Narcisse est ce héros mythologique qui s’est noyé à force de contempler son image dans un lac. Le moi peut être fasciné par lui-même et se noyer dans le bain de sang moderne de cette fascination.

La mort des deux syndicalistes martiniquais, du Covid-19, en plein atelier santé pendant le conflit, parce qu’ils ont refusé de se faire vacciner, en est l’exemple terrifiant. 

L’identité du Moi, si vitale pour l’humanité, a mal tourné et a donné lieu à la folie tragique du mythe identitaire, « le moi se prenant au piège de lui-même ».

Ainsi, l’émission Revue de Presse de la radio Guadeloupe Première a surfé sur cet extraordinaire déni de la mortalité covid dans un fantasme primaire. Une chroniqueuse n’a cessé de répéter à l’emporte-pièce pendant une heure que les langues se déliaient, que la vérité allait enfin éclater, puisque les statistiques officielles avaient livré leur verdict : Le Covid ne représente que 2% des hospitalisations en 2020. 

Pourtant il suffit de regarder les chiffres un peu plus attentivement, comme France Info du 17/11, pour comprendre qu’il s’agit d’un lissage qui est trompeur, et qui fait disparaitre comme par magie, les vagues épidémiques, a indiqué Djillali Annane, le chef du service de réanimation de l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches.

Pour les détracteurs de la gestion politique de la crise sanitaire, ce chiffre est la preuve que la gravité de l’épidémie a été exagérée. Mais le chiffre prend en compte l’ensemble de l’année 2020, or en France le pic a été atteint au printemps et en automne. Les malades sont arrivés en très grand nombre, et en très peu de temps.

La lecture d’autres chiffres confirme la dangerosité du virus. Les patients atteints du Covid représentent 12 % des décès.

Dans le service des soins critiques, le Covid-19 représentait 5 % des hospitalisés et 13 % des décès. Dans le service des réanimations, les patients Covid ont représenté 11 % des admis, et 16 % des décès.

Pour Mahmoud Zureik, professeur d’épidémiologie et de santé publique à l’université Versailles-Saint-Quentin-en Yvelines, cette pathologie a pesé donc à elle seule pour 19 % du nombre de jours d’hospitalisation en réanimation en 2020, souligne-t-il, alors qu’elle n’est pas présente pendant les deux premiers mois de 2020, et qu’il y a eu accalmie entre juin et septembre !

Il présentait un parallèle avec l’utilisation d’une voiture personnelle. 

J’ai fait 15 000 kms en voiture en 1 an. Je peux affirmer que j’ai donc fait du 1,5 km/heure sur l’année (ou plutôt 1,7).

On peut faire dire n’importe quoi aux chiffres. Pour notre économiste chroniqueuse, ce n’est pas flatteur. Le pire, c’est qu’aucun de ses confrères ne l’a repris !

Et que penser de la fameuse émission toujours de Guadeloupe la Première sur les effets indésirables des vaccins !

 

Alors que les réactions indignées au courrier du président de la CCI ont été nombreuses, aucun media n’a parlé des commentaires des professionnels de l’audiovisuel de l’outre-mer, atterrés par autant de légèreté. Le blog d’Adap France association de défense de l’audiovisuel public, du 13 décembre 2021, est sans concession. 

Extraits. « Une heure sur le Service Public audiovisuel, une heure pour flinguer des semaines de pédagogie sur le terrain pour inciter une population réfractaire au vaccin à se faire vacciner

Une « journaliste » présentatrice qui parsème également les journaux de reportages antivax et pro-séditions.

Les médecins de Guadeloupe sont abasourdis, le Ministère de la Santé aux abois.

Qui a validé cette émission ?

 

Le rédacteur-en-chef de Guadeloupe la Première est le premier responsable éditorial. La responsable d’édition l’a alerté et il a refusé de tenir compte de l’alerte. Elle a refusé de signer au générique.

La journaliste présentatrice a eu le champ libre, sans contrôle, pour fabriquer sa propagande.

Le rédacteur-en-chef était proche idéologiquement des antivax et des bloqueurs de route.

Et la question principale reste : combien de guadeloupéens, persuadés par l’émission de France Télévisions Guadeloupe la Première, que le vaccin est dangereux, vont-ils mourir de la Covid-19, étouffés par un tuyau de plastique dans la gorge, agonisant, crevant de trouille, en pensant que peut-être que deux piqures auraient suffi pour les sauver… et qu’ils ne les ont pas voulues à cause d’une émission de télévision de service public.

Un procès aura-t-il lieu pour définir les responsabilités et mettre en accusation certains ?

L’émission de Guadeloupe la Première, financée totalement par de l’argent public, fabriquée par des salariés de France-Télévisions, a été un outil, une arme, pointée sur les guadeloupéens », conclut l’article.

Remarquons encore une fois qu’on ne peut être qu’éberlués par le manque de professionnalisme de ceux qui président aux destinées des rédactions de nos territoires.

Encore une fois, laissons de côté les thèses des partisans et des opposants à la vaccination, retenons l’essentiel. Une telle émission  n’aurait jamais pu être présentée dans l’Hexagone. Sur le reste du territoire national, auraient été mis en perspective les avis de professeurs de médecine, des réanimateurs du centre hospitalier universitaire de la Guadeloupe- ce sont eux qui sont quand même les experts – !, dans de salutaires et bénéfiques échanges.

Mais n’oublions pas que nous sommes aussi le seul territoire au monde où des syndicalistes s’improvisent administrateurs d’hydroxychloroquine (voir l’article du Figaro Vox : aux Antilles pourquoi une telle complaisance ?), exigent des tribunaux l’administration d’une substance qui a été jugée dangereuse, après seulement trois semaines d’essais par les médecins de ce même CHU de la Guadeloupe !  

Reprenons simplement les termes d’un chroniqueur d’un blog martiniquais. « En Martinique, comme en Guadeloupe, tout ou presque manque de rigueur. On ne valide rien, et c’est peut-être ce qui nourrit le concept de la spécificité tellement chère à nos politiques ».

Sidney Tarrow est mondialement connu pour ses recherches dans les domaines de la politique comparée, des partis politiques, des mouvements sociaux, et des actions collectives.
Le modèle de Sidney Tarrow sur les cycles de protestation (ou cycles de controverse : en anglais cycles of contention), fait référence à trois étapes : la phase ascendante de la mobilisation jusqu’à son pic « mobilization peak », suivie par une période de démobilisation, elle-même marquée par un double processus d’institutionnalisation (avec cooptation d’anciens protestataires) et de radicalisation (d’une minorité jusqu’au-boutiste et en perte de vitesse).

En Guadeloupe et Martinique, le pic de mobilisation se situerait bien évidemment lors des émeutes, et des blocages. Concernant le double processus référencé, nous avons à la fois effectivement une « institutionnalisation » du dialogue avec la création tant en Guadeloupe et Martinique d’ateliers, -même si ceux-ci demeurent hypothétiques en Guadeloupe, exceptés ceux consacrés à la jeunesse-, et aussi la radicalisation de la minorité s’illustrant par exemple en Guadeloupe, avec l’intrusion violente au Conseil Régional, et les coups portés mardi au directeur de l’hôpital et à son adjoint.

En analysant les ressorts des mouvements sociaux particulièrement en Guadeloupe, on peut noter que le discours de mobilisation globale répétée de façon lancinante par le syndicat UGTG, se heurte en général à l’indifférence lassée des habitants sauf à deux occasions, assurément de taille, 2009 avec le problème de la vie chère, et avec la thématique actuelle de l’obligation vaccinale, soit des leviers de contestation très éloignés de la dialectique ugététiste.

On peut penser que conscient qu’ils ne peuvent désormais que s’appuyer sur les lauriers de la direction voulue charismatique, du conflit de 2009, célébrée toujours de manière emphatique, dans le sanctuaire du Palais de la Mutualité, et dans son autre fief qu’est le CHU de Pointe-à-Pitre, le nomadisme subversif de la part de cellules de quelques activistes, la violence ethnico-séparatiste dirigée contre l’Etat français destinée à compenser l’absence de crédibilité et l’ extinction progressive de sa fonction d’impulsion, se limitant dorénavant à la capitalisation syndicale, le mouvement actuel s’efforce de compenser par la surenchère le rétrécissement et la vulnérabilité de sa base.

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Théo LESCRUTATEUR

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