Quel avenir pour l’audiovisuel public ultramarin ?
Présentation succincte
Actuellement l’audiovisuel public d’outremer est composé comme suit :
A Malakoff
– Un centre qui abrite une rédaction de 50 journalistes
– Une rédaction TV
– Une rédaction radio
– Une rédaction internet
– Des studios de flux TV
– Des studios radios
– Une direction générale
– Une direction technique
– Des services administratifs (RH, paie, etc.)
Pour chaque département ou territoire d’outremer, une station qui comprend
– Une rédaction polyvalente ou une rédaction tv et une rédaction radio
– Un chargé de mission internet
– Des studios de diffusions TV et Radio, des régies, des moyens mobiles.
Le personnel des stations oscille entre 70 et 250 en fonction de la taille du territoire. Les stations sont positionnées sur chaque territoire d’outremer, dans trois bassins identifiés :
Atlantique :
Saint-Pierre-et-Miquelon, Guadeloupe, Martinique, Guyane
Pacifique :
Polynésie française, Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna
Océan Indien :
La Réunion, Mayotte
La direction de ces stations est archaïque : un directeur régional, assisté d’un directeur des antennes, d’un rédacteur-en-chef, d’un directeur technique et d’un responsable administratif.
La gestion éditoriale de ces stations est totalement déconnectée de la population au sens large : citoyens ou élus et tient très rarement compte des besoins des collectivités territoriales, de leurs projets politiques locaux ou internationaux. Les besoins en information culturelles, techniques, scientifiques, officielles, sont ignorés.
Le directeur est attentif aux soubresauts sociaux éventuels de sa station, car sa direction parisienne lui demande une paix sociale comme seul but avoué. L’ambition de programmes est depuis longtemps éteinte…
La gestion « Ernotte-Kotra » a totalement annihilé les ambitions de développement des productions de bassins. Les rédactions partent à vau-l’eau et sombrent dans un train-train anesthésiant. Pourtant les besoins sont énormes :
Même si Internet et la TNT ont apporté une proximité informative et une normalité française, il reste que les problèmes particuliers des stations sont à traiter.
C’est un mode de gestion ignoré par FranceTélévisions qui gère de façon lointaine, un peu comme des stations étrangères, ces unités qui ressemblent aux régions de France 3 mais qui n’en sont pas. L’inscription de chaque territoire dans son bassin devrait être un axe éditorial…
Mayotte dont la population parle shimaore ; c’est-à-dire un swahili identique à celui parlé à Dar-es-Salaam, n’a pas d’émission en langue vernaculaire. Quel directeur est allé au Mozambique ou en Tanzanie pour procéder à des échanges avec les télévisions publiques ?
Cette station, dirigée soit par des métropolitains, soit par des réunionnais, affiche des ambitions « océan Indien, » orientées vers la Réunion ou Maurice ou vers la métropole… sans un regard vers les pays africains proches.
C’est un exemple, répété à foison : Wallis-et-Futuna a peu d’échanges avec le Royaume de Tonga, qui parle la même langue polynésienne (Wallis fut une colonie tongienne) ou les Samoas, d’où sont originaires les futuniens…
L’ouverture de la Guyane vers le Brésil est encore à faire, tout comme vers les nations du plateau des Guyanes.
Il n’y aucune politique de bassin de la Guadeloupe vers la Martinique et la rédaction minuscule qui s‘occupe de la Caraïbe est en Martinique sans lien avec la Guadeloupe…
La Réunion se prend soit, pour une partie de la métropole soit pour le donneur de leçon de Madagascar…
Il est évident que les missions de France Ô-Premières s’inscrivent plus dans le cercle de compétences de France Média Monde que dans celui de France Télévisions…
L’inscription systématique des stations dans leur environnement géographique est encore à faire. Leur révolution éditoriale vers une information locale de service public est à inventer.
Si l’intégration de RFO dans France Télévisions a permis une remise à niveau morale, technique et financière, continuer serait suicidaire et laisser l’audiovisuel public d’outremer au sein de France Télévisions signifierait sa disparition au profit de groupes privés dans un délai assez court.
Si c’est la volonté de l’Etat, il faudrait le signifier clairement.
Mais on peut imaginer un schéma qui satisfasse tout le monde, Etat compris, car abandonner l’audiovisuel public des outremers c’est aussi couper un lien qui relie chaque territoire à la France européenne.
Et ce serait un dommage évident, non pour des raisons nationales ou nationalistes mais tout simplement humaines : chaque famille dans les outremers a un lien personnel avec la métropole : études, scolarités, affaires, armée, médecine, amitiés. Briser RFO et vous brisez ce lien…
Quels programmes faut-il pour une population qui vit à des milliers de kilomètres de son centre de décisions politiques, culturelles ?
C’est à la population et à ses représentants de donner leur avis. Les citoyens doivent s’emparer des thèmes nécessaires à leur vie ou survie : changement climatique, écologie, économie, médecine, etc…
La mission de l’audiovisuel de service public n’est pas seulement de divertir mais bien de former et d’informer.
On peut donc dans le cadre de la Holding, pour le même financement, mettre en place une structure autonome rattachée à France Média Monde…
Ce transfert au sein de France Media Monde, permettrait à l’audiovisuel public des outremers de fonctionner de façon plus souple, plus efficace, plus économe et d’aller à la rencontre d’autres structures et d’autres professionnels rompus aux problématiques d’éloignement, de réelle diversité. Il permettrait d’échanger avec des organismes qui pratiquent aussi le double ou le triple média : Radio -Télévision – Internet…
Cette note n’a comme but que de soulever un problème qui devient urgent : l’avenir de l’audiovisuel public pour les outremers français. Actuellement à la dérive morale, proche du naufrage, ce changement de statut suivi d’une réflexion approfondie sur le sens de sa mission permettrait d’affûter un outil indispensable pour le développement des outremers français.
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