Polémique en Argentine suite à un article sur l’absence de joueurs noirs dans la sélection
« Pourquoi n’y a-t-il pas de joueurs noirs dans l’équipe argentine ? » : l’article de Erika Edwards pour le Washington Post a suscité un vif débat dans ce pays qui ne s’est pourtant pas gêné de populariser ce chant : « Ils jouent en France mais viennent tous d’Angola. Que c’est beau, ils vont courir. Ils aiment les travestis comme ce putain de Mbappé. Sa mère est Nigériane. Son père est Camerounais. Mais sur le document nationalité : française ».
Le Dr Erika D. Edwards est professeure agrégée d’histoire latino-américaine. Elle a obtenu son doctorat à l’Université de Floride en histoire de l’Atlantique spécialisée sur l’Amérique latine et l’Afrique atlantique précoloniale. Elle est l’auteur d’une analyse de l’invisibilité noire et de la construction de la race en Argentine.
L’auteure précise que « l’Argentine a été la patrie de nombreux Noirs pendant des siècles », mais qu’elle a essayé « de construire son image de pays blanc ». Son article a déclenché un grand débat racial en Argentine, après que l’équipe transandine ait affronté les Pays-Bas en quart de finale de la Coupe du monde au Qatar.
Selon les archives historiques, le seul joueur noir à avoir joué pour l’équipe nationale argentine était Alejandro Nicolás de los Santos, dans les années 1920-1930.
Un autre « mythe » mentionné est le manque de visibilité noire dans la société argentine dû à des épidémies, comme la fièvre jaune à la fin du XIXe siècle, qui auraient davantage affecté cette population en raison de sa pauvreté. « Faux car les données montrent que les épidémies n’ont pas plus tué la population noire que les autres ».
« … La présence de personnes qualifiées de morochos est un clin d’œil à cette histoire d’effacement des Noirs et des peuples indigènes. Morocho est un terme inoffensif qui fait référence à ceux de couleur bronzée, et est utilisé comme un moyen de distinguer ceux qui ne sont pas blancs ».
L’experte soutient que : « Cette histoire montre clairement que, bien que l’équipe de football argentine ne comprenne peut-être pas de personnes d’ascendance africaine, ou peut-être des personnes que la plupart considéreraient comme noires, elle n’est pas complètement blanche « . Selon elle, « il est probable que plusieurs joueurs de l’équipe actuelle soient qualifiés de morochos en Argentine ».
« Le morocho le plus célèbre d’Argentine est peut-être la légende du football Diego Maradona », insiste Edwards, ignorant que le « morocho » le plus célèbre est le chanteur de tango Carlos Gardel, une icône populaire aussi grande que Maradona. Gardel n’est sans doute pas né en Argentine. Il y a deux théories : l’une prétendant qu’il est né en France et l’autre qu’il est né en Uruguay…
« Erika Denise Edwards est une ignorante de l’histoire. Elle ne sait pas que l’Argentine n’est pas un pays ségrégationniste et que les personnes d’ascendance africaine dans ce pays ont été amenées par des immigrants européens » a réagi le journaliste Lucio Albirosa sur Twitter.
Le conservateur anglais Ben Harris-Quinney, président du Bow Group, s’est invité dans le débat, en critiquant l’article : « Ces lignes sont écrites par des gens qui connaissent rien au football… Le Washington Post laisse-t-il entendre qu’il y a de bons joueurs noirs Argentins qui ne sont pas sélectionnés pour cause du racisme ? Qui sont-ils ? Aucune nation de football ne laisse de côté de grands joueurs à cause de la race « , a-t-il écrit sur Twitter.
« Bien que difficile, cet échange est nécessaire pour prendre en compte le passé. Certains n’ont peut-être pas aimé cette mise en avant sur la race, mais les questions sur la perception de l’Argentine de sa blancheur et de son manque de diversité ont beaucoup à voir avec leur culture et leur histoire ».
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