Oui Mr le Président, le chlordécone est bien cancérogène
En minimisant les conséquences du chlordécone lors du débat consacré aux Outre-mer avec cette phrase : « il ne faut pas dire que le chlordécone est cancérigène », le président de la République a provoqué la réaction des professeurs dédaignés par lui, Luc Multigner et Pascal Blanchet dans un communiqué publié le 2 février. Nous en livrons le contenu.
Le vendredi 1er Février 2019, lors du débat entre le Président de la République et les élus de l’Outremer, des propos ont été ténus au sujet du chlordécone et notamment sa dangerosité.
Nous tenons à rappeler des faits dument vérifiables :
– Le Centre International de la Recherche sur le Cancer, une agence de l’OMS. a établi en 1979 « qu’il existe des preuves suffisantes pour considérer que le chlordécone est cancérogène chez la souris et le rat » et qu’en absence de données chez l’Homme, il était « raisonnable, à des fins pratiques, de considérer le chlordécone comme s’il présentait un risque cancérogène pour l’Homme ». En 1987, cette même institution a classé le chlordécone dans la catégorie cancérogène 2B (peut-être cancérogène pour l’Homme).
Depuis cette date, le chlordécone n’a fait l’objet d’aucune réévaluation par cette institution.
– En 1981, le Département de la Santé et des Services Sociaux des Etats-Unis a estimé que le chlordécone pouvait « être raisonnablement considérée comme cancérogène pour l’Homme », puis l’Agence de Protection de l’Environnement des Etats-Unis comme « susceptible d’être cancérogène pour l’Homme ».
– En Europe, le chlordécone est classé comme « cancérogène possible », ce qui correspond à la catégorie 2 de la classification CMR, classification règlementaire en France selon le code du travail. Selon l’article R-4412-6() du code du travail, modifié par le décret 2012-530 du 19 avril 2012, « On entend par agent cancérogène.. -. toute substance classée cancérogène. …de catégorie 2 »
– En 2010, nous avons publié dans la littérature médicale internationale, à comité de lecture indépendant, des travaux de recherche menées auprès des populations antillaises et qui montraient que l’exposition au chlordécone est associée à une augmentation de risque de survenue du cancer de la prostate.
Ces conclusions pourraient susciter — c’est légitime — de la controverse dans la communauté scientifique, mais force est de constater qu’à ce jour elles n’ont pas été contredites par des recherches publiées dans la littérature internationale selon les règles habituelles d’évaluation et de transparence.
Pascal Blanchet
Professeur des Universités – Université des Antilles
Chef de Service d’Urologie du CHU de Pointe à Pitre
Luc Multigner
Directeur de Recherche à l’Inserm
Les propos tenus dans le présent communiqué n’engagent que leurs auteurs et nullement leurs institutions de rattachement.
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