Le Gwoka serait-il redevenu indésirable ?
Considérés comme des « vyé-nèg », nos ainés se sont toujours battus pour défendre le Gwoka. Aujourd’hui, alors qu’il est joué dans le cadre familial, dans les associations, dans les églises, lors des luttes sociales, sur les scènes du monde entier, alors que son inscription sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de I’humanité de I’UNSECO le 26 novembre 2014 a marqué une phase essentielle de ce combat, le festival qui lui est consacré depuis 32 années, pourrait mourir du jour au lendemain.
En cause, une réduction drastique des subventions des collectivités locales. En cause, une orientation de la politique culturelle ne favorisant pas les pratiques traditionnelles. En cause, un manque de reconnaissance du festival dans le calendrier des évènements artistiques de la Guadeloupe.
Et pourtant, nous n’avons pas manqué durant toutes ces années de promouvoir la culture traditionnelle de notre pays, de la faire connaitre tant en Guadeloupe, que par le biais de coopération internationale. Depuis longtemps, et cette année encore, par courrier daté du 31 mars 2019, nous avons, entre autres, sollicité : la Région Guadeloupe, le Conseil Départemental, la Communauté d’Agglomération Riviera du Levant (CARL), pour établir des conventions pluriannuelles assises sur des projets d’actions d’envergure afin d’étudier et promouvoir les pratiques culturelles guadeloupéennes.
En effet, au-delà du festival, il reste de nombreuses actions à conduire, comme :
* La création et la diffusion de documentaires sur le Gwoka ,
* L’amélioration de la place du Gwoka dans les média publics ;
* Le renforcement du soutien aux lieux et espaces de diffusion existants ;
* La création de supports de communication pour assurer la présence sur les marchés et salons internationaux de la musique ;
* La mise en œuvre d’une exposition permanente sur le Gwoka.
Nous avons invité les institutions à adopter et porter ensemble, les objectifs suivants.
– Sensibiliser sur l’importance de la place et du rôle de la transmission tant formelle qu’informelle et sa réelle prise en compte dans les politiques publiques
– Mieux mettre en valeur les porteurs de la tradition, par un inventaire détaillé des acteurs et de leurs pratiques ;
– Sensibiliser sur la nécessité de sauvegarder leur héritage par tous moyens permettant que leurs connaissances soient transmises au plus large public Faire connaitre et favoriser la création d’outils pédagogiques ;
– Contribuer avec le festival à leur assurer une meilleure et visibilité ;
– Faire connaitre les mesures de sauvegarde proposées pour la consolidation du GWOKA et œuvrer à leur réalisation.
Ces propositions n’ont pas été entendues, pire encore. en dépit des promesses orales, la part de financement public du festival est réduite de 15%. A titre d’exemple, la participation de la CARL a été réduite de 9 000, celle de la Région Guadeloupe de 5 000€.
Ceci est d’autant moins acceptable que le festival est un évènement annuel incontournable qui a lieu à la meme période Cette diminution est mortifère pour nos pratiques culturelles. ElIe nous oblige à réduire considérablement le programme des manifestations.
Nous souhaitons rappeler que contrairement à d’autres événements culturels en Guadeloupe, plus de 9 596 € des dépenses du festival sont consacrées aux acteurs économiques qui œuvrent à sa réalisation, et surtout aux artistes guadeloupéens qui s’y produisent !
L’argent public que nous sollicitons pour réaliser le festival ne s’en va pas ailleurs ! II est consommé en grande partie en Guadeloupe même. II est un facteur de développement économique du pays.
Le festival œuvre également la diffusion du créole, tant dans les chansons que par le biais de ses supports de communication. Quel a été notre étonnement de ne pas voir le festival recensé dans les manifestations de « KRÉYOL AN MOUVMAN 10 ANS» organisé par le Conseil Départemental ?
Nous déplorons le fait que le GWOKA qui constitue la matrice fondamentale de la culture de la Guadeloupe, que nous disons « TAN NOU ! » soit si peu considéré, si peu reconnu, si peu soutenu, si peu financé que le Gwoka serait redevenu indésirable ?
Pourquoi faut-il tant se battre pour le faire reconnaitre en Guadeloupe, 5 ans bientôt après une reconnaissance internationale ?
Et pourtant, Georges TROUPÉ dont nous commémorons les 10 ans de la disparition, dans son fameux « LYEN ÉTEWNEL :
« Mizik-la sa, mésyé sé tan nou, I ja vrè Otan mizè ki nou-menm,
Pa tini mwayen tiré-y an-nou, Pou nou sé gété, tristes, soutyen-menm »
Clame haut et fort, que le Gwoka est indissociable des Guadeloupéens !
En cette année, où nous souhaitons mettre à l’honneur, un musicien avant-gardiste, un pionnier de l’enseignement du Gwoka, un résistant à la bien-pensance de la première heure, un des premiers, aux côtés de Félix qui a compris l’importance de consacrer un festival spécifique à notre musique, il n’est pas concevable que nous rencontrions tant de difficultés pour lui rendre un hommage ô combien mérité !
Nous plaçons donc, cette édition du festival sous le signe de la RÉSISTANCE !
Nous appelons les institutions à se ressaisir pour entrer en RÉSISTANCE avec le peuple !
Nous appelons les Guadeloupéens à entrer en RÉSISTANCE en soutenant financièrement et par leur participation, le festival qui est consacré depuis plus de 30 ans, à LEUR musique !
Ce Festival tenu à bouts de bras par le Comité d’Animations Sportives et Culturelles entend, une fois de plus, en l’honneur des illustres porteurs de tradition, réserver une place de choix aux musiques et danses de la Guadeloupe et notamment au GWOKA.
Cependant, il n’est plus possible de conduire avec si peu de moyens, une tache de cette ampleur. Le temps est venu de rappeler à tous, l’engagement qu’ils ont pris lors du soutien de l’inscription du GWOKA sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de I’UNSECO.
Le temps est venu de transformer les paroles en actions concrètes génératrices de retombées sur le plan économique, artistique mais également sur le plan de la fierté et de la dignité retrouvées des Guadeloupéens en leur culture qui mérite d’être connue et partagée.
Le Conseil d’Administration du CASC
Association organisatrice du
FESTIVAL GWOKA
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