Ghislaine Joachim-Arnaud vole la vedette à Bruno Le Maire
Bruno Le Maire ne gardera pas de bons souvenirs de son passage jeudi soir dans « L’Emission politique » de France 2. Non seulement le programme animé par David Pujadas et Léa Salamé a enregistré la pire audience de France 2 depuis 5 ans avec 1 838 000 de téléspectateurs, (loin des 2 750 000 d’Alain Juppé) mais il a reçu une brique de lait et un duplex avec Ghislaine Joachim Arnaud syndicaliste depuis la Martinique a tourné au clash. De quoi rêver d’être reçu par Karine Le Marchand sur M6 dans « Une ambition intime ».
« Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de Cour vous rendront blanc ou noir ». Et Bruno Le Maire est certainement misérable aux yeux de France Télévisions car impossible d’imaginer le choix de Ghislaine Joachim Arnaud comme une volonté brutale d’ouverture au monde ultramarin totalement occulté depuis toujours. Nicolas Sarkozy et Alain Juppé soigneusement épargnés, pour cette 4ème émission, France 2 avait choisi le trash pour booster son audience.
Car si Bruno Le Maire avait été bien renseigné, (mais la Martinique c’est loin et ses conseillers en communication n’ont pas senti le danger) il se serait gardé de toute familiarité avec la leader syndicaliste martiniquaise, GJA née en 1952, technicienne de laboratoire, porte parole de « Combat Ouvrier », Secrétaire Générale de la CGTM dont on connaît la fougue et les positions bien tranchées.
Membre du « K5F » lors de la grève de février 2009 en Martinique, une plainte pour incitation à la haine raciale déposé contre elle pour ses propos : « On bann betché volè pwofitè nou ké fouté yo déwo, komba ta la fok nou kontinyé » (Une bande de békés, voleurs, profiteurs, on les mettra dehors, ce combat-là nous devons le continuer), elle est finalement relaxée par la Cour d’appel de Fort-de-France.
Son leïtmotiv : « L’organisation économique qui prévaut en Martinique, avec la concentration du pouvoir économique entre les mains de quelques-unes, est au cœur des problèmes. C’est une question hautement politique. Il faut y répondre. »
L’échange d’amabilités débute avec un rappel à l’ordre sec de Ghislaine Joachim Arnaud : “Monsieur, excusez-moi, je vous respecte, je vous appelle Monsieur Le Maire. Je ne me permettrais pas de vous appeler par votre prénom. Non monsieur, vous m’appelez Madame Joachim-Arnaud, mais vous ne m’appelez pas Ghislaine, je ne suis pas votre amie. […] Vous êtes dans un camp, je suis dans un autre !”.
Par la suite, alors que Bruno Le Maire expose sa vision du syndicalisme, la syndicaliste lui répond : “Mais Monsieur. Excusez-moi de vous le dire. Tout ça, c’est du pipi de chat, vous m’entendez ? On vit dans une société où il y a des patrons, des employeurs, des salariés, des exploités, des millions de gens qui ont des emplois précaires. C’est ça la vérité. Vous voulez supprimer le droit pour les travailleurs de présenter leur candidat au travers des organisations qu’ils ont choisies. Continuez comme ça et vous verrez que les opprimés et les exploités sauront se mettre debout ».”
A partir de ce buzz, diffusé en boucle tout le weekend, on peut se poser la question du rôle des journalistes qui laissent les contradicteurs interpeller vertement les politiques à leur place, jouant eux les modérateurs bien éduqués. La démocratie ne peut se résumer à des déclarations enflammées et sincères sans un véritable questionnement des programmes et le bilan des actions menées par les responsables. Et les candidats se montreront de plus en plus frileux pour répondre au public en direct. Les présidentielles de 2017 semblent parties sur de mauvais rails.
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