Littérature

CUBA L’ODYSSEE MEDICALE

CUBA L’ODYSSEE MEDICALE édition Owen Publishing

Jean-Jacques Seymour est né à Mézin d’une mère agenaise et d’un père Guadeloupéen. Diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse, il est journaliste éditorialiste spécialisé dans les dossiers de la Caraïbe dont il a suivi les processus de décolonisation sur ces 20 dernières années. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont  Une obsession nommée Hugo (Menaibuc Editions 2007), Les chemins des proies, Une histoire de la flibuste (Ibis rouge 2010) et La Caraïbe face à la mondialisation (Ibis rouge 2010). Il a publié en mars 2018 chez Owen Publishing Cuba, l’odyssée médicale préfacé par le Dr Marie-Antoinette Séjean. Il nous montre étape par étape, comment l’île a réussi le pari de se doter de médecins qualifiés et en nombre, grâce notamment à des investissements dans la médecine et dans la recherche et à une politique forte favorisant les études médicales. 

97L : Qu’est ce qui vous attire et vous interroge sur l’histoire de CUBA ?

Tout jeune j’ai su que nous avions un environnement, où se déroulait une histoire différente de la nôtre. Pire, que l’on nous la cachait. Naturellement j’ai cherché à comprendre et je dois beaucoup à un professeur guadeloupéen dont j’ai découvert le premier livre d’histoire consacré à cette région : le Professeur Jacques Adelaïde Merlande. J’ai dévoré ce livre et j’ai voulu aller au-delà. Ce fut le temps des voyages dans les îles qui étaient encore sous influence britannique. Le temps des études et l’entrée dans la vie professionnelle qui a bien fait les choses. Dans les années 70, la Grande-Bretagne se séparait de ses colonies. J’ai eu la chance de couvrir, jeune journaliste, toute la levée des drapeaux de cette région. Un carnet d’adresse est né et le reste est venu naturellement. Je suis profondément caribéen et j’ai pu rencontrer tout ce qui compte dans cette zone. Mes écrits en témoignent.

97L : Quelle métaphore faites-vous du titre de votre CUBA L’ODYSSEE MEDICALE ?

Le mot voyage correspond parfaitement à votre question. C’est un voyage à travers la politique développée par l’état cubain au moment de la prise du pouvoir par Fidel Castro  Un voyage qui n’a jamais cessé et qui se poursuit jusqu’à aujourd’hui parce que la volonté politique de l’état n’a jamais faibli.

97L : Que retenez-vous de vos rencontres avec les différents médecins et institutions ?

C’est bien entendu la volonté sans faille des autorités cubaines de suivre et de poursuivre le programme qu’elles avaient décidé de mettre en œuvre. Mais surtout le fait que ce petit pays sous embargo depuis plus de 50 ans, isolé du monde par cet embargo criminel, ait pu mener à bien ce programme en faisant preuve d’une imagination sans bornes (l’éducation du peuple y est pour beaucoup). Quand Castro a dit que la santé était une priorité, tous les esprits, les scientifiques se sont mis au travail. Aujourd’hui tout le monde sait lire et écrire à Cuba et tout le monde est soigné GRATUITEMENT. Aujourd’hui le résultat est là : 1 médecin pour 142 habitants. Dire qu’en France on parle de déserts médicaux.

97L : Quelles sont les trois étapes de bases dans l’internationalisme médical cubain depuis 1959 ?

Les premières années du processus révolutionnaire (dont le meilleur exemple reste l’envoi des missions au Chili et en Algérie). Les années du milieu de la décennie 1970 à 1979 (alors que le pays, soutenu par l’Union soviétique et les pays socialistes d’Europe, a développé un programme particulièrement fort de coopération en Afrique subsaharienne), et enfin, la période qui a commencé en 1990, après l’accident du réacteur nucléaire de Tchernobyl survenu en 1986. Elle a été suivie par une augmentation importante de la coopération médicale vers la fin de cette décennie, fondamentalement en Amérique latine et dans les Caraïbes, après les ravages causés par les ouragans George, en Haïti, et Mitch en Amérique centrale. Cette dernière étape a donné lieu à de nombreuses initiatives, allant des programmes de santé intégrale (utilisés dans des dizaines de pays du Tiers Monde) et l’accès aux soins de base à des millions de personnes qui, dans de nombreux cas, n’ont jamais reçu la moindre attention médicale, jusqu’à l’arrivée du contingent médical d’urgence « Henry Reeve » un énorme succès, déployé à la suite de catastrophes naturelles.

97L : Quelle est l’approche cubaine de L’ELAM (Ecole Latino-Américaine de la Havane) des formations dans les échanges de bourses des jeunes médecins et chercheurs ?

L’école latino américaine de la Havane n’est pas une faculté de médecine au rabais. Elle est ouverte bien entendu aux jeunes cubains, mais aussi aux Caraïbes, à l’Amérique latine voire aux américains par le biais de partenariats. La faculté de Philadelphie est en lien direct avec l’ELAM. La philosophie de l’école est de porter dans le monde ses connaissances reconnues par la communauté internationale notamment l’OMS (organisation Mondiale de la Santé).

97L : Y a t-il une loi qui interdit le médicament l’Heber-Prot-P (pour les diabétiques) au niveau européen ou national ?

La question de l’Heber Prot est intéressante. C’est une découverte de la médecine cubaine qui promet la fin de l’amputation des patients diabétiques en phase terminale. Elle a joué son rôle et empêcher cette amputation de milliers de patients atteints de l’ulcère du pied du diabétique, à Cuba, dans les caraïbes et jusqu’aux Etats-Unis.  Les laboratoires cubains HEBER-BIOTEC et la firme étasunienne Mercurio Biotec ont décidé d’unir leurs efforts pour distribuer aux États-Unis l’HEBER-PROT-P, ce médicament cubain qui a largement prouvé son efficacité dans le traitement du pied du diabétique. C’est extraordinaire et notre combat, ce livre va nous y aider, est de faire comprendre aux autorités françaises qu’il est absolument nécessaire pour notre région où la prévalence diabétique est énorme. Pour des raisons politiques et parce que le vent ne souffle pas dans le bon sens pour les laboratoires pharmaceutiques, les autorités ne veulent pas en entendre parler. C’est de la littérature cubaine avait dit à un député la Ministre de la santé du gouvernement Ayrault.

97L : Comment analysez-vous les relations entre le Président Donald Trump et le gouvernement Cubain ?

Les annonces faites par le président actuel  signifient un recul dans les relations bilatérales.  Ces nouvelles mesures correspondent à un durcissement de l’embargo contre Cuba, en vigueur depuis 1962, et sont imprégnées d’une rhétorique vieille et hostile propre à la Guerre Froide. Le discours de Trump  marque une rupture symbolique dans un processus de rapprochement qui s’était matérialisé par la visite historique de Barack Obama à La Havane en mars 2016. Mais on aura noté que  le rétablissement des relations diplomatiques entre les deux anciens pays ennemis n’est aucunement remis en cause. Wait and See.

97L : Quelles sont les investissements de recherche à cuba en matière d’immunologie ?

Le Centre d’immunologie moléculaire (CIM) s’inscrit dans la stratégie cubaine visant à développer des thérapies contre le cancer et autres maladies auto-immunes, en s’appuyant sur des méthodes biotechnologiques. Pour remplir son objectif social, le CIM compte plus de 1100 travailleurs hautement qualifiés, dont plus de 40 docteurs et 150 masters en sciences, qui ont à leur actif 45 inventions. Le Centre a déposé 729 brevets à l’étranger (355 obtenus) et publié plus de 500 articles dans des revues scientifiques.

97L : La politique de Raoul Castro pour le système médical est-elle autre que celle de Fidel Castro  ?

Raoul Castro a lancé une série de mesures d’austérité concernant le système de santé qui consiste en partie à des réductions drastiques de personnel dans ce secteur. «Il faut que l’on finisse avec les dépenses irrationnelles de l’Etat dans le secteur de la santé », avait lancé Raul Castro en 2010. Tout un symbole alors que Castro disait en 1960 : «l’avenir de notre patrie doit être, nécessairement, un avenir d’hommes de sciences».

97L : Quel diagnostic peut-on retenir de votre ouvrage  ?

Pour un étranger qui examine ce phénomène complexe et multidimensionnel, il est clair que le développement d’une conscience sociale et politique élevée dans la population cubaine est une base indispensable à l’acceptation de ces politiques d’envergure. Le succès du programme d’internationalisme médical, a lui-même renforcé au fil des ans, la fierté et le sentiment d’identité nationale. La Constitution cubaine exprime l’engagement du pays dans « l’internationalisme prolétarien, […] l’amitié fraternelle, le soutien, la coopération et la solidarité des peuples du monde, notamment en Amérique latine et dans les Caraïbes ».

97L : Quels sont vos  projets ?

Je vous informe  que dans le cadre de Conakry  capitale mondiale du livre du 21 au 25 Avril, le commissariat général  Sansy Kaba Diakité m’invite à la clôture de l’événement et à la 10 ème édition des 72 heures du livre où « Cuba l’odyssée médicale » fera l’objet d’une présentation spéciale. Les activités se poursuivront du 26 au 30 avril  à Nzérékoré ville invitée d’honneur. Cette invitation que j’ai le plaisir  d’honorer  me permettra  de parler du rôle  de Cuba  l’odyssée médicale’ dans l’éradication du virus Ebola sur la terre guinéenne il y a 3 ans.

 

Wanda Nicot

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