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Christiane Delannay-Clara : J’ai été traitée comme une merde, comme un chien

L’année 2019 s’annonçait radieuse pour cette candidate d’ouverture idéale du RN. Une union de raison entre cette obscure élue guadeloupéenne et l’ancien Front National. Mais le fiancé annula le mariage au dernier moment au grand dam de la dulcinée esseulée. Les illusions perdues de Christiane Delannay-Clara.

@CDC

Le Pen cherchait une élue guadeloupéenne

97L : Racontez-nous votre ahésion au Rassemblement National.

C’est très bien que vous utilisiez le terme adhérer. Car ce n’est pas une adhésion pure et simple mais dans le cadre d’une liste d’ouverture pour les Européennes. J’ai été présentée à Marine Le Pen par l’intermediaire de Blaise Aldo, ancien député européen en lien avec André Rougé (le  Monsieur outre-mer du RN, ancien secrétaire national UMP en charge des Outre-mer, ndlr) qui a rejoint le rassemblement depuis 2017. Marine le Pen cherchait une élue guadeloupéenne.

Je ne voulais pas être la négresse de service

97L : Une guadeloupéenne précisément  ?

Oui. Une élue guadeloupéenne ayant un parcours interessant et je l’ai convaincue. Nous avons discuté. J’ai défini mon programme, ma vision des choses, le cadre dans lequel je me joignais à eux. J’ai précisé que « je ne voulais pas être la négresse de service ». Mes conditions : ne pas être encartée, me retrouver en position éligible et participer aux commissions qui me permettraient d’être utile à l’outre-mer : la coopération, le développement, les ACP…

Je n’ai ni mendié, ni quémandé aucune faveur, aucune place. Je me suis expliquée en Guadeloupe à tous ceux qui étaient surpris par ma démarche. Il faut parfois des alliances contre nature pour faire avancer les choses.

La personne qui m’a remplacée était mise en avant

97L : En mars vous participez à la conférence de presse nationale. Et patratas, vous disparaissez des listes en avril.

Le 11 mars, apres la convention de janvier, apres le salon de l’agriculture aux côtés de Marine le Pen, je viens expressément pour cette conférence et je suis confirmée pour ma 12eme place. Nous partons le 12 mars avec la tête de liste Jordan Bardella et André Rougé en Guyane, Martinique et Guadeloupe.

J’ai senti que la personne qui m’a remplacée depuis (Maxette Grisoni-Pirbakas, présidente de la FDSEA en Guadeloupe, ndlr) était mise en avant. Elle avait été présentée elle aussi à Marine Le Pen fin décembre par le délégué du RN de Guadeloupe mais finalement pas retenue.

Malgré ce ressenti, j’ai poursuivi mon travail sans me préocuper des rumeurs. Je devais ramener mon attestation d’inscription et participer à la grand messe du 1er mai. J’ai reçu de Kevin Pfeffer (Délégué national et membre du Bureau national du RN, ndlr) un mail me demandant d’être présente à partir du 21 avril. Je m’exécute donc, prends mon billet pour cette date. Le mardi 23 avril je me rends au siège du RN oú je suis bien accueillie par lui. Ayant des documents à remplir, nous convenons d’un nouveau rendez-vous pour le lendemain.

Le mercredi 24 avril, j’arrive rue des Suisses à 9 h et quart environ. A ma grande surprise, on m’en refuse l’accès. Je proteste, je ne comprends pas. On me dit que ce sont les ordres. J’insiste encore et encore. J’appelle Kevin Pfeffer, Marine le Pen sur son portable personnel. Personne ne me répond. Et à la longue, je finis par comprendre que ce que la presse de Guadeloupe murmurait depuis quelques jours était vrai. Je n’etais plus sur la liste.

J’ai été traitée comme une merde, comme un chien

97L : Personne au RN n’a évoqué votre possible éviction ?

Personne. Le 17 avril, une semaine avant, ce sont des gens en Guadeloupe qui me faisaient part de certains échos défavorables. Mais je n’y croyais pas ou ne voulais pas y croire. Et les prévenances de Kevin Pfeffer m’ont rassurée.

Je suis restée devant l’entrée jusqu’à midi. J’ai été humiliée. Je me suis dit : « On va quand même me laisser aller aux toilettes ». Aucune réponse. Rien. Debout sur le trottoir à contacter toutes mes connaissances. Crispée, j’ai fait une crise de tétanie. J’ai été traitée comme une merde, comme un chien. Ecoeurée, j’ai fini par partir. Plus tard, j’ai reçu un message Whatsapp confirmant mon éviction.

97L : Pour quel motif ?

On me reproche d’avoir menti sur mon CV. Or, pour la petite histoire, ce sont eux qui ont forcé le trait. Dans le Parisien ils disent qu’ils ont mal interprété mes dires. J’ai relu mon discours, à aucun moment je ne me présente comme adjointe à Creteil*. Par contre il se peut que lors d’une interview j’ai commis un écart de langage. Mais vous ne pouvez pas savoir les pressions que j’ai subies de leur part…

97L : De quel type ? 

En fait, ils voulaient absolument que je paraisse comme un transfuge des socialistes. J’etais l’outre-mer et les banlieues à la fois. Pour me défendre, je precise qu’à Creteil, en dehors de toutes mes activités, j’ai été membre du PS pendant 2 ans.

L’autre reproche lu dans la presse, serait que je n’ai pas respecté les règles du fonctionnement de la campagne. Maintenant je comprends ce que cela veut dire. Dans les réseaux sociaux il est dit que la personne qui m’a remplacée a payé pour être sur la liste. Si cela s’avère vrai, c’est donc une histoire de marchandage et pas de compétence.

Je me souviens aussi que le délégué RN de Guadeloupe m’a dit maintes fois que je n’avais pas le coeur RN et que je ne parlais pas assez d’immigration. J’étais trop technique, trop pédagogue et pas assez sur les termes porteurs de voix. J’ai été humiliée et salie. Et je ferai campagne pour révéler le vrai visage du RN.

M. Grisoni-Pirbakas tres présente lors de la visite de J. Bardella @RN

Je n’oublie pas mon passé, je connais mon histoire

97L : On vous rétorquera qu’en tant qu’antillaise, descendante d’esclave, vous vous êtes embarquée avec un parti sulfureux.

Je ne regrette pas ce que j’ai fait. Voilà ma vision des choses. Dans l’histoire du monde, apres des batailles, il a bien fallu que les frères ennemis se mettent ensemble pour arriver à un consensus, défendre une cause commune.

Moi, ce que je voulais, c’etait aller à Bruxelles pour le respect des textes qui nous régissent, qui ne sont pas utilisés par nos élus. Des lois reconnaissent nos spécificités, et nous permettraient de tirer notre épingle du jeu si elles étaient utilisés même à minima. Et ce n’est pas le cas…

Je peux citer Delgres qui s’est fait sauter à Matouba « Vivre libre ou mourir ». Il n’y avait pas que des descendants d’esclaves parmi ses hommes… J’ai saisi une perche qui m’a été tendue. Je n’oublie pas mon passé, je connais mon histoire. Je cherchais à atteindre un but mais c’est l’argent qui a primé.

A l’époque de la révolution française, j’aurais déjà été guilllotinée

97L : Allez-vous démissionner du conseil municipal de St François ?

Non je n’en ai pas l’intention. Je reste dans le droit. Le maire de St Francois, de manière unilatérale, m’a exclu de la majorité municipale, l’UPSF l’Union Pour Saint François pour « haute déloyauté politique et morale ». Si nous étions à l’époque de la révolution française, j’aurais déjà été guilllotinée. Pourtant, au sein de l’UPSF, il y a des élus de différents partis et je fais remarquer qu’il y a un indépendantiste qui peut se présenter à d’autres élections avec son idéologie. Mais c’est un homme… Je continue à être convoquée au Conseil municipal, au Conseil de la communauté d’aglommération. Je reste élue du peuple jusqu’en 2020.

Nous sommes dans le « fend’ tchou »**

97L : Ex socialiste désavouée, personna non grata au RN, mise à l’index à St François, est-ce de l’opportunisme ou de la naïveté politique chez vous ?

Peut être de la naïveté mais surtout de l’honnêteté, de la hargne à vouloir défendre des idées, faire émerger des gens qui ne sont pas attachés à des carcans mais sont dans la construction. Je suis victime de ma rectitude et continuerai à me battre pour nos valeurs. Les politiques ont tendance à abrutir les gens et à s’entourer de moutons. Même si cela m’a couté ma place au parlement européen, je poursuis ma participation à la vie de la « cité » par conviction.

La France nous doit énormément. Serait-elle la 2eme puissance maritime sans nous ? L’outre-mer c’est 500 ans d’histoire. Nous sommes le passé, le présent et le futur de la France. Quand la France sortait du moyen-age, heureusement qu’il y avait les colonies pour faire sa richesse. Nous avons notre mot à dire. Arrêtons donc de subir.

Ce qui me fait mal au coeur c’est que dans mon cas nous sommes dans le « fend’ tchou », un phénomène bien connu en Guadeloupe. On a eu affaire à des esprits grincheux en mal de reconnaissance, complexés, qui se sont mis au service de certains blancs, à l’esprit colonisateur. Toutes ces forces se sont alliées pour faire de moi ce que je suis devenue.

97L : Vous n’avez jamais cité le nom de votre remplaçante.

Non car l’antillaise est le potomitan, le pillier de notre société. Et je constate que par son action, cette dame qui m’a remplacée a humilié ce que nous avons de plus noble. C’est vraiment triste pour nos peuples.


* discours du 11 janvier : Je suis repérée par le maire socialiste de Creteil, Laurent Cathala. Dès lors, je rentre à ses côtés en politique. Élue, je suis en charge des affaires européennes. Je contribue à la veille juridique dans le cadre de la coopération.

« Contrairement aux déclarations de l’intéressée », elle « n’a jamais été élue municipale à Créteil » Laurent Cathala, maire PS de Créteil.

** fend’ tchou : volonté de faire du mal à quelqu’un, de l’abattre.

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Joël DIN

Joël DIN

1 Comment

  1. Sylvain
    mai 3, 2019 at 14:51 — Répondre

    Bonjour, je suis choqué par les propos de cette Christiane car elle joue sur les mots, elle a dit dans son discours : « Je suis repérée par le maire socialiste de Creteil, Laurent Cathala. Dès lors, je rentre à ses côtés en politique. Élue, je suis en charge des affaires européennes. Je contribue à la veille juridique dans le cadre de la coopération. « .

    En gros, elle dit qu’elle a travailler avec le Maire PS de Créteil ! Elle emploie bien le mot Elue, elle se moque de qui ?

    Tous les candidats du RN présents sur la liste pour les européennes de 2019 défendent la ligne de Marine Le Pen. Cette Christiane arrive avec que ses idées, et ne défend même pas la ligne du mouvement. Elle se croît où ?

    Elle le reconnaît elle-même dans votre article mot pour mot :  » je fais remarquer qu’il y a un indépendantiste qui peut se présenter à d’autres élections avec son idéologie « . Ou encore :  » J’ai précisé que « je ne voulais pas être la négresse de service ». Mes conditions : ne pas être encartée, me retrouver en position éligible et participer aux commissions qui me permettraient d’être utile à l’outre-mer : la coopération, le développement, les ACP… Je n’ai ni mendié, ni quémandé aucune faveur, aucune place. Je me suis expliquée en Guadeloupe à tous ceux qui étaient surpris par ma démarche. Il faut parfois des alliances contre nature pour faire avancer les choses.  »

    Elle privilégiait donc que son idéologie personnelle… Ce n’est pas comme ça que cela fonctionne dans un parti surtout au RN… On n’est pas au PS ou chez LR où chacun fait ce qu’il lui semble ! Je conteste les propos de cette Christiane… Elle a exigée d’être en position éligible sans être encartée ! Mais elle se croît où ? Dans un centre commercial ? Il y a des militants qui attendent des années pour pouvoir figurer sur cette liste, et quant ils y arrivent, c’est en position non éligible et en bas de liste comme Julien Sanchez ! Elle a donc demandait un pass droit ! Elle a aussi dit dans son discours du 14 Janvier 2019 que les SEGPA accueillaient des enfants avec un trouble du comportement, mais c’est vraiment n’importe quoi ! En terme de compétence, c’est donc zéro !

    Je ne parle même pas de ses interviews, c’est catastrophique ! Elle ne parle que d’elle ! Elle a un énorme problème d’égo ! Que tous vos lecteurs lisent mon commentaire ! Je suis membre du RN depuis 2011 ! Ce n’est que mon opinion !

    Bonne journée.

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