2017 : Je vais peut-être enfin trouver mon identité de Guadeloupéen
L’année 2016 étant terminée, j’ai décidé de faire l’inventaire de mes identités. Ce ne fut guère facile car je suis l’homme titulaire du plus grand nombre d’appellations. Tenez, je vous livre quelques noms par lesquels je suis interpellé quotidiennement.
Je suis né à Gourbeyre, je suis donc « Gourbeyrien », cela coule de source. Alors lorsque j’entends : « Hé toi le Gourbeyrien », je me retourne car je sais qu’il s’agit de moi. Seulement Gourbeyre étant situé dans la région de Basse-Terre, de facto je suis un « Basse-Terrien ». Jusqu’ici tout va bien. Mais où ça se complique c’est que Gourbeyre et Basse-Terre étant situées en Guadeloupe, je ne peux éviter la dénomination de « Guadeloupéen » qui me colle à la peau. Ces trois mots, je les assume pleinement.
Les choses auraient pu s’arrêter là, mais il a fallu que la Guadeloupe se trouve aux Antilles et voilà sans que l’on me demande mon avis, je suis « Antillais ». Vous vous dites sans doute que la boucle est bouclée ? Que nenni ! Les Antilles étant situées dans la Caraïbe, je suis donc « Caribéen ».
Récapitulons : Je suis donc : Gourbeyrien, Basse-Terrien, Guadeloupéen, Antillais et Caribéen. A toute fin utile, je vous rappelle que j’ai un nom et un prénom qu’il faudra aussi ajouter à cette liste.
Ah j’oubliais, la Guadeloupe c’est la France, (pas du tout rétorqueront mes amis nationalistes, expatrié selon un candidat aux présidentielles, entièrement à part selon d’autres, pas de type caucasien donc pas représentatif du pays…). enfin, bref ! Je suis déclaré « Français » Ce n’est pas drôle mais c’est comme ça ! La Guadeloupe faisant partie des DROM je suis du coup un « Domien » terme remplacé depuis peu par « Ultra-marin ». Cela commence à être lourd à porter, mais ce n’est qu’un début car j’allais oublier que la Guadeloupe faisant partie de la Caraïbe qui elle-même est située en Amérique centrale, je suis aussi un « Français d’Amérique ».
Pour échapper à ces appellations multiples, j’ai décidé d’aller vivre dans l’hexagone, ce fut pire. A peine étais-je arrivé à Paris, pour mes amis restés au pays, j’étais devenu le « Parisien » ou le « Métropolitain ». Au travail je fus d’abord le « stagiaire » avant d’être le « titulaire », puis le « Collègue », le « noir » pour les plus jeunes, le « nègre » pour ceux d’un certain âge, « l’Africain » pour ceux qui avaient des doutes sur mes origines, le « Negzagonal » pour une partie de la communauté, « l’Euroblack » pour ceux qui ne savaient ou me placer, le « Renoi » pour ceux pratiquant le verlan, « l’Homme de couleur » pour les plus érudits, le « Black » pour les stylés et pour les autres qui s’étaient rendus dans les îles, le « Créole ». Pour les indécis, j’étais le « Métis », le « Mulâtre », « l’Ilien », « Chocolat », le « Bronzé », le « Basané », alors que sans le savoir j’étais devenu un « Bumidomien » puisque c’était le BUMIDOM qui m’avait envoyé en France. En tout cas dans mon quartier où ne vivaient que des blancs, j’étais tout simplement « l’Etranger » alors que j’étais « Européen » comme eux.
Faisons le point une nouvelle fois. Je suis : Gourbeyrien, Basse-Terrien, Guadeloupéen, Antillais Caribéen, Domien, Ultra-marin, Français d’Amérique, Parisien, Métropolitain, Stagiaire, Titulaire , Collègue, Noir, Nègre, Africain, Negzagonal, Euroblack, Renoi, Homme de couleur, Créole, Métis, Mulâtre, Îlien, Chocolat, Bronzé, Basané, Bumidomien, l’Etranger , l’Européen.
Oui je suis tout cela à la fois, mais la liste est encore longue avant que je ne fasse le point sur toutes les appellations qui me collent à la peau, toutes mes identités quoi. Car figurez-vous que je suis catalogué parfois de « Béké » par certains, sans doute par dérision, parce que je n’ai pas la peau particulièrement foncée. Pour d’autres je suis « Chaben », « Batazindien », « peau chapée », « boug an mwen », « Timal la », « Môso fè la », « Chef », « Patron », « Camarade » pour mes amis syndicalistes, « Mari » pour ma femme, « époux » pour l’état-civil, « Papa » ou « Papounet » pour mes enfants et «Papy » ou « Grand-père » pour mes petits-enfants.
Je croyais avoir mis un point final à cette encyclopédie dédiée à mon identité, mais il était dit que seule la mort y mettrait une fin et encore. Car avec l’âge, je suis devenu un « Ainé », un « Vieux », un « Ex », un « Troisième âge », une « Fin de vie », un « Vieillard ».
Alourdi par toutes ces identités, j’ai décidé d’aller vivre sur une île déserte. Et comme personne n’a plus eu de mes nouvelles, je suis devenu le « Déserteur », le « Disparu », le « Défunt ». Je m’en doutais de ce qui se disait sur moi alors je suis revenu et là j’ai entendu des choses atroces, par exemple : Voilà le « Revenant », le « Lâche », le « Couillon » et bien entendu le « Cocu » puisque pour certains ma femme m’avait rapidement remplacé.
C’est un peu tiré par les cheveux je l’admets, mais tout de même, que celui qui ne trouve pas une part de vérité dans mes propos me jette la première pierre.
Très bonne année à tous !
Hugues PAGESY
1 Comment
Well, well, well un peu d’humour en l’an de grace 2017 cela ne fait pas de mal loin de là, j’ai pour ma part ri et bien ri parce que ce témoignage devrait être passé à chacun de nous peu importe la couleur pour juste réfléchir à ce que l’on dit sans quelque fois s’en rendre compte….
Même si certains vous le disent pour voir votre réaction, c’est là qu’il faut laisser glisser et dire sans le dire encore un ignare parce que si l’on ne connait pas une personne le plus simple c’est de lui demander son nom… ou se présenter avant d’entamer un échange souvent à bâtons rompu .
et ne pas s’avancer sur des hypothèses (tu es antillais , tu es guadeloupéen , tu es, tu es , tu es) qui sont des affirmations.
En tout cas, je me suis retrouvé dans certains des adjectif cités donc maintenant tant que l’on ne me demande pas mon nom, je fais l’autruche ….. mais le plus grave des fois certains ne vous saluent même pas avant de vous solliciter pour x chose (informations, soutient divers ect)
Dans notre empressement d’échanger nous zappons souvent les préliminaires ou préambule inhérente à la discussion qui va suivre ou pas. Souhaitons que cette année nous remettent dans le bon sens de la discussion, ou l’échange je serai tenté de dire.
VIVE 2017 longue vie à tous ….